Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques    de

  

11ème  Saison     Chroniques   11.01   à   11.05    Page  171

 

           

 Le  Bigger Bang  des Rolling Stones à Paris

     

Les Rolling Stones en suspens devant Keith Richards

     Retour de flamme au 59ème Festival de Cannes

   

Les  MOLIERES

Nominations   2006               Palmarès   2006

Le  Point de vue  a priori de Theothea
Le  Point de vue  a posteriori de Theothea

   

Festival d' Avignon  2006

59ème   Festival du Film de Cannes   2006

Toutes nos  critiques   2005 - 2006

   

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OPUS COEUR

de  Israël Horowitz

mise en scène    Stéphan Meldegg

****

Théâtre Hébertot

Tel:  01 43 87 23 23 

 

        

     

En cette rentrée théâtrale, le duo Pierre Vaneck / Astrid Veillon assure d'emblée sur la scène du Théâtre Hébertot une complémentarité de jeu d'où la tension émotionnelle surgit dans la confrontation de deux destins contrariés.

Ainsi précédant juste de quelques longueurs sur la ligne de départ les trois Isabelle, Adjani, Huppert et Carré dont le charisme sur les planches n'est plus à prouver, Astrid Veillon se trouve de fait en position de challenger... si toutefois d'aucuns pouvaient déjà penser aux Molières en ces prémices de la saison 2006-2007.

Il faut dire que cette comédienne trentenaire révélée au public du spectacle vivant par le "bon vouloir" du Prince Alain Delon si non du pygmalion, pour "Les Montagnes russes" au Marigny en 2005, n'a eu de cesse de réclamer l'interprétation de "Kathleen" auprès de Stephan Meldegg, metteur en scène de cet "Opus coeur" mais a priori convaincu que le physique trop favorable de l'actrice ne convenait pas à la perspective du rôle.

Il faut dire que du "coeur à l'ouvrage", Astrid Veillon n'en est pas parcimonieuse même après déjà une quinzaine de représentations jusqu'à afficher, en début de pièce, une fébrilité peut-être par trop intensive. En obtenant son passeport pour une confrontation en tête à tête avec l'un des comédiens les plus talentueux de sa génération et, de toutes évidences, à 75 ans plus à l'aise que jamais sur les planches, elle s'est engagée pour le meilleur et pour le pire dans une relation conflictuelle en huis clos qu'elle se doit d'assumer jusqu'à la lie.

A l'issue du combat, il fallait voir l'autre soir, la rayonnante Isabelle Aubret se lever des premiers rangs pour applaudir debout Astrid ne sachant plus contenir son émoi après deux heures de lutte intérieure avec les démons du ressentiment.

En effet lui Jacob Brackisch, professeur à la retraite de musicologie et de littérature anglaise l'a engagée elle, Kathleen Hogan, pour effectuer des tâches ménagères et d'aide à personne handicapée dont elle n'a guère la compétence. C'est dans leur insatisfaction respective vis-à-vis de la reconnaissance sociale que ces deux-là vont tenter de communiquer leur frustration personnelle en tentant de "faire payer" au partenaire la souffrance qui les ronge. L'enjeu va s'avérer fondamentalement culturel mais ses modalités se substitueraient volontiers aux simples règles du savoir-vivre et surtout aux élans sincères de l'empathie.

Succédant au triomphe de "Moins 2" qui accompagna le duo "Trintignant/Dumas" lors de la saison précédente au Théâtre Hébertot, le thème de la "fin de vie" risque de s'y perpétuer avec "coeur" en un somptueux décor de Stéphanie Jarre où la moindre des performances ne sera pas tant de souhaiter différer l'échéance fatale plutôt que de réussir à gagner la paix avec soi-même et si possible la grâce avec autrui.

Theothea le 08/09/06

UN CHEVAL

de  Jean-Marie Besset

mise en scène    Gilbert Désveaux

****

Théâtre Pépinière-Opéra

Tel: 01 42 61 44 16

 

     Photo    Ld.  Claire Besse  

         

"Mon royaume pour un cheval" soupirait sur le champ de bataille le "Richard III" de Shakespeare.

A la Pépinière-Opéra, "François", l'antihéros de Jean-Marie Besset n'aura pas l'opportunité d'une déclaration aussi pathétique mais néanmoins c'est bel et bien la survie amoureuse de son couple qui va se tramer sous les sabots de son poulain favori "Karma des êtres".

En effet joueur non repenti devant le magnétisme des champs de course, François cultive le "gentleman agreement" qui sied à toutes les addictions qui oseraient sans coup férir le coup du "Cheval de Troie".

Ainsi introduit jusque dans l'intimité familiale, le virus hippique peut alors tenter tous les déguisements de l'accoutumance au jeu d'argent, aucune force au monde ne sera en mesure d'éviter la contamination de l'enfant et de l'épouse qui peu à peu s'impliqueront à leur corps défendant dans l'espoir du gain mirobolant à venir, fût-il symbolisé par un manteau de fourrure promis en cadeau affectif de valeur par François à Lucia.

Inspiré librement par "L'Influence de l'argent sur les histoires d'amour" de Christophe Donner, le texte malicieux de Jean-Marie Besset semble ici prendre à contre-pied les références conformes à son image d'auteur débusquant habituellement les faux-fuyants des moeurs contemporaines.

En outre délibérément désuète dans le fond et dans la forme, la mise en scène de Gilbert Désveaux surligne la ringardise voulue des personnages qui se complaisent ainsi dans une distanciation systématique avec la "roue de la fortune".

Si le jeu de Jean-Marie Besset semble se positionner à la manière étrange d'un "Jean-Pierre Léaud époque Truffaut" mais en apesanteur, au demeurant les interprétations de Camille Japy et Éric Théobald ont tout particulièrement retenu notre attention.

L'ensemble donne lieu à un spectacle décalé vis-à-vis duquel la perplexité du spectateur est censée se résoudre en pleine sidération d'une bande dessinée proposée "grandeur nature" selon la méthode "moraliste à rebours" bien éprouvée d'antan par les célèbres "Pieds Nickelés". A chacun d'apprécier en totale subjectivité !....

Theothea le 09/09/06

LE JARDIN

de  Brigitte Buc

mise en scène    Jean Bouchaud

****

Théâtre des Mathurins

Tel: 01 42 65 90 00

 

          

     

Sous les auspices du prénom féminin à la mode sur les planches parisiennes en ce début de saison 06-07, c'est donc une "Isabelle" qui va faire la pluie et le beau temps dans le jardin de Brigitte Buc, symbolisé par Alain Chambon sous une "petite musique" de Jean Bouchaud.

Quatre personnages esseulés par la perfidie de la vie l'accompagnent dans un jeu du chat et de la souris où ensemble ils abandonnent leurs affects aux aléas d'une mélancolie fédératrice.

Déphasés les uns par rapport aux autres, il réussissent néanmoins l'exploit, en déambulant durant une heure et demie autour d'un loppin de verdure, à peindre par petites touches ajustées les rebonds d'un mal-être existentiel où la métaphore d'une société célibatante se coltine avec les clichés caduques de la famille traditionnelle.

Tous les maux du monde moderne occidental effleurent leur propension à s'inspirer de la tête enfouie de l'autruche alors même que le ciel est d'un bleu limpide et que fortuitement il y aura toujours une bonne âme pour secouer les autres de la torpeur communicative.

Si le ton de l'auteur est poétique, son propos est de ramener sans cesse les protagonistes à leurs frustrations amoureuses, sociales, professionnelles et même métaphysiques. En effet les gens actuellement, remarque l'un d'entre eux, ne sont pas heureux parce que précisément, ils sont sans cesse à la recherche du bonheur. Auparavant chez les anciens, cette quête n'existait pas et d'ailleurs n'aurait guère eu de sens.

Isabelle Gélinas, puisque c'est donc d'elle dont il s'agit, compose en la circonstance le portrait de Jeanne, une mère devenue acariâtre et envieuse en élevant seule son enfant sous la veille culpabilisante du modéle social tronqué. Pour Philippe (Guillaume de Tonquédec) et Antoine (Marc Fayet) les deux mecs en présence, c'est la même chanson de l'impasse professionnelle plus ou moins latente et enveloppée sous des bravades sociales qui font long feu des déceptions du conjugal, de la paternité et de l'amour.

Le troisème âge incarné par Suzanne (Annik Alane) n'est pas en reste avec son cortège d'embarras pour tenter, en réflexe de survie, de susciter autour d'elle le goût perdu de la joie de vivre.

Quant à Violette (Cécile Rebboah) en mal de sa province, la plus jeune représentante de ce potentiel féminin, elle aura aussi sa part d'insatisfactions quotidiennes et de traumatismes à gérer au mieux de la dénégation exhibitionniste, par exemple.

Bref, tout ce voisinage de quartier s'étant regroupé dans la solidarité affective pourrait surmonter tant bien que mal toutes les misères du monde qui ainsi les tenaillent... si toutefois le coup de grâce ne leur était asséné par l'annonce de la fermeture prochaine de ce jardin, lieu par excellence de rencontre fort profitable... pour cause officielle d'insécurité.

Plus roman à thème que acte théâtral, cette première pièce de Brigitte Buc a le mérite de placer subtilement les enjeux psycho-sociaux bien en vue sur le banc du square, mais prend le risque, en les abandonnant à leur errance, de les laisser se démonter inéxorablement sous nos yeux dans des "lieux communs" jusqu'à admettre avec un sourire désabusé, la clôture sans appel d'un éventuel "paradis terrestre".

Theothea le 14/09/06

L'IMPORTANCE D'ÊTRE CONSTANT

de  Oscar Wilde

mise en scène    Pierre Laville

****

Théâtre Antoine

Tel: 01 42 08 77 71

 

    Photo  DR.  Gilles Bureau  

     

Quand deux jeunes amis aristocrates, l'un fortuné l'autre pas, l'un dandy londonien l'autre gentleman de province, tous deux empêtrés dans le poids des convenances à respecter, vont céder à la tentation de s'inventer une raison impérieuse afin de rencontrer leur future épouse respective, Jack et Algernon devraient se sentir solidaires dans leur affabulation salvatrice.

Et pourtant c'est bel et bien la rivalité qui va les opposer dans leurs démarches concomitantes comme s'ils essayaient de conquérir la même dame.

Cependant au coeur du quiproquo, c'est la similitude du stratagème d'identité qui va s'inviter sur le terrain des hostilités amoureuses, en les présentant chacun respectivement comme le frère d'un certain "Constant", prénom délicieusement équivoque qui a le mérite de pâmer immédiatement les deux jeunes femmes, Gwendolen (Gwendoline Hamon) et Cecily (Marie-Julie Baup).

En effet "earnest" or not "Ernest", telle sera la question sous-jacente en langue anglaise originale renvoyant à une double signification implicite et paradoxale, "sincère" et "menteur de fait" tout à la fois.

Se prenant la ruse malhabile en boomerang, c'est d'abord la dualité outrée des prétendantes au seul "Constant" de leur coeur qu'il va leur falloir affronter mais c'est surtout le veto de Lady Bracknell, une tante gardienne jusqu'au-boutiste des règles de bienséance qu'ils auront à défier tous ensemble.... découvrant fort opportunément au final la chance fraternelle d'être bien né "Constant"!...

Si Frédéric Dieffenthal entre de plain-pied dans l'imposture mystificatrice de Jack, Lorànt Deutsch semble plus appliqué aux entournures mondaines, restant en deçà de toute mythomanie flamboyante.

Dans un décor affriolant et lumineux de Pace, la distribution de Pierre Laville s'avère équilibrée et cohérente, tout en ne déléguant les authentiques accents de délire sous contrôle qu'à Macha Méril dont le savoir-faire tient à distance les rênes de cette ultime et subtile comédie d'Oscar Wilde.

Theothea le 15/09/06

ADULTERES

de  Woody Allen

mise en scène    Benoît Lavigne

****

Théâtre de l'Atelier

Tel: 01 46 06 49 24

 

     Photo  DR. Emmanuel Robert  

     

Remarquable direction d'acteurs dont Woody Allen devrait être considérablement honoré et fier s'il avait la prochaine opportunité de venir à Paris pour assister à une représentation d' "Adultères", ce dont d'aucuns de ses conseillers devraient le persuader !...

En effet avec son approbation, trois de ses pièces en un acte ont été judicieusement réunies au théâtre de l'Atelier en illustration de ce thème extra conjugal paradoxalement fédérateur pour en constituer une trilogie à la fois réjouissante et quasiment philosophique:

Thèse, antithèse, synthèse.... dans l'ordre à 19h00 "Riverside drive" puis à 21H00 "Central Park West " suivi sans entracte d'"Old Saybrook ".

Ce "rallye du tendre" cible l'oeuvre du célèbre metteur en scène new-yorkais pour en extraire la substantifique comédie humaine autour du sexe avec son cortège de contradictions institutionnalisées et ses fantasmes dénués de toute langue de bois.

En une progression savamment orchestrée par Benoît Lavigne tout au long de la soirée, un couple de comédiens va accompagner ces trois phases pseudo libidinales en un vaste jeu de rôles où Pascale Arbillot inscrira avec conviction la discontinuité du fil conducteur féminin mettant en valeur par contrastes le comportement velléitaire du pôle masculin:

Face à elle, Xavier Gallais va y transcender les trois personnages dont il a la charge d'assumer la lâcheté et la mauvaise foi: Véritable leçon incarnée de l'actor's studio, sa performance le place définitivement au meilleur de sa génération.

Pierre Cassignard, Valérie Karsenti, Bernard Verlès, Eglantine Rembauville, Fabrice de La Villehervé & Dominique Daguier vont chaperonner ce duo récurrent, au gré de rencontres pouvant réunir du "sdf" au "propriétaire" un milieu de "bobos", en des relations transversales scindant une société sous dominante de sex-appeal mais sans repères tangibles.

Psychanalyse grandeur nature du couple moderne en dégénérescence pour ne pas dire en décomposition, l'homme s'y avère aussi aventureux qu'indécis pendant que la femme se préoccupe en priorité de sa capacité d'influence et de séduction.

Très proche de Feydeau dans sa forme théâtrale et ses rebondissements, c'est la fantasmagorie de l'inconscient qui va élaborer les soubresauts de l'attirance sexuelle en une chorégraphie de pantins en recherche candide d'une réflexion fondamentale sur l'Amour.

C'est néanmoins le comportement sexuel des oies qui tranchera en faveur d'une fidélité purement instinctive, garantissant ainsi de manière exemplaire ce que devrait être la pérennité de la relation amoureuse projetée en objectif éthique avec à la clé, un happy end à cette série d'adultères à répétition et sans perspective.

L'affectivité triomphant avec raison du sexe azimuté, Woody Allen donnera ainsi ici sa chance ultime... à l'humour.

Theothea le 18/09/06

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