Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

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11ème  Saison     Chroniques   11.16   à   11.20    Page  174

 

               

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VOTRE SERVITEUR ORSON WELLES

de  Richard France

mise en scène    Jean-Claude Drouot

****

Théâtre Marigny Popesco

Tel: 01 53 96 70 20

 

     Photo  © Lot

     

Au cigare près, la réalisation de Jean-Claude Drouot qui se met lui-même en scène dans le personnage d'Orson Welles en fin de vie pathétique, est d'ores et déjà un must du spectacle vivant estampillé par une date butoir au 1er février 2007.

En effet à cette échéance prochaine de seulement quatre petits mois, il ne devrait plus être possible à l'illustre comédien du Français d'arborer en des volutes de fumée inhalée avec la délectation sensuelle de l'hédoniste, fût-il isolé dans la cage de scène faisant office de hotte aspirante... sans tomber sous le coup de la loi proscrivant désormais de fumer dans un espace public.

Il faut dire que Jean-Claude en profite largement une bonne demi-heure durant, venant même agiter sous le regard des premiers rangs, l'énorme bâton de maréchal à l'extrêmité rougeoyante pouvant symboliser avantageusement la transcendance de l'artiste tout autant que sa vulnérabilité car inexorablement, au 31 janvier 07, ce talisman de scène devra être déposé au rayon des accessoires caduques ou ne se contenter d'apparaître que dans l'exctinction de son feu intérieur.

Cependant là-même où l'objet pouvait faire figure d'anecdote aléatoire, comment imaginer la statue du Commandeur sans ce précieux sceptre tout fumant en pleine signifiance de la fascination que peut exercer Orson Welles sur la mémoire collective.

" Le roi est nu " pourrait-on dire alors !... Ce qui serait paradoxalement le meilleur atout pour assurer la prolongation du succès de ce spectacle au-delà de la date fatidique, car le dénuement s'avère effectif:

En effet les soixante-dix ans d'Orson ont plongé le célèbre metteur en scène dans des revers financiers tels qui le contraignent pour assurer sa survie créatrice à passer la plus grande partie de son temps actif à enregistrer des messages publicitaires insipides à la radio.

Son compagnonnage avec un technicien attentionné pour effectuer ce labeur affligeant va transformer leur partenariat en une relation complice et allégorique où Le Don Quichotte de l'un ne sera pas nécessairement le Sancho Pancha de l'autre, mais à deux ils trouveront la voie d'un certain état de grâce que Jean-Claude Drouot aura le talent de partager en pleine noblesse avec Serge Le Lay.

Aussi pour ces cent minutes d'anthologie cinéphilique à Hollywood, " Serviteur en salle Marigny/Popesco ! ".

Theothea le 11/10/06

LA PETITE CHRONIQUE D'ANNA MAGDALENA BACH

de  Esther Meynell

mise en scène    Laurent Fréchuret

****

Théâtre Sartrouville

Tel: 01 30 86 77 77

 

      Photo  L.D. visuel affiche

           

Cette "petite chronique..." est l'occasion d'une biographie familiale réunissant Jean-Sébastien Bach le compositeur de renom, Magdalena sa seconde femme et leur treize enfants mais est aussi l'opportunité d'une rencontre artistique entre le directeur du Théâtre de Sartrouville Laurent Fréchuret en tant que metteur en scène, la codirectrice du Théâtre de Privas Elisabeth Macocco en tant que comédienne et le jeune prodige David Greilsammer comme pianiste.

A trois, ils ont concocté un spectacle de cent minutes où la première heure est consacrée à jouer avec la vérité d'une destinée, puisque les souvenirs subjectifs d'une épouse depuis sa rencontre avec Bach son futur mari jusqu'à la mort de ce dernier ont été travestis, sous identification fallacieuse, grâce au récit d'une romancière Esther Meynell, musicologue dans les années 20.

C'est précisément cette auto-identification qui a intéressé Laurent Fréchuret en organisant la substitution d'un vécu dans la projection théâtral d'un ego, à l'ombre du génie, réinventé par l'imaginaire d'une auteur se prenant à son propre jeu.

Par la suite les quarante minutes à venir permettront de s'immerger dans l'oeuvre musicale de Bach en appréciant d'autant mieux le pianiste sur scène qu'il s'avérera un clone idéal du compositeur de génie.

Cette approche de la réalité historique par le biais du "mentir vrai" est une habile illustration du geste théâtral au-delà du masque traditionnel.

Ces deux périodes complémentaires de ce spectacle au Théâtre de Sartrouville(du 3 au 13 oct. 06 puis tournée 07) ont procuré la sensation d'une agréable veillée autour d'un feu provincial (consumé en l'occurrence par des bougies) où l'art conjugué du récit et de la musique a la vertu de susciter la divagation mélancolique de l'âme.

Theothea le 11/10/06

BAAL

de  Bert Brecht

mise en scène   Sylvain Creuzevault 

****

Théâtre Odéon Berthier

Tel: 01 44 85 40 40

 

      Photo  © Pidz

     

Acteur Pasolinien s'il en fût, Damien Mongin fascine autant qu'il horripile à l'image de cette très jeune compagnie "D'ores et déjà" dont il symbolise le flamboiement et l'audace.

Effectivement comme l'on sait depuis Corneille que la valeur n'attend pas le nombre des années, il apparaît avec évidence que cette troupe mise en scène par Sylvain Creuzevault, se présentant en public pour la première fois au complet, est un repère de talents en éclosion à l'instar peut-être de celle du "Café de la gare" à l'époque héroïque.

Ah! combien de "Patrick Dewaere" pourraient sommeiller en plusieurs d'entre eux, et pourquoi pas de "Miou-Miou" ?

Néanmoins sans doute plus à l'aise dans l'improvisation maîtrisée parce qu'expert en animation, leur prestation collective souffre d'une intensité formelle au détriment d'une véritable force identitaire.

En conséquence le texte proprement dit donne souvent la sensation de n'être qu'un alibi au culot scénique dont ils font preuve constante. Engouement de jeunesse certes, mais peut-être aussi déficit d'expérimentation sur le ressentiment vécu de l'intérieur du personnage plutôt que de son comportement.

Toujours est-il que cette deuxième version initiale du Baal de Bert Brecht datant de 1919 dans une traduction et adaptation de Eloi Recoing permet de découvrir une création particulièrement originale de l'auteur âgé alors d'à peine vingt années.

Présenté à l'Odéon Berthier comme une succession de vingt-huit scènes autonomes reliées par une volonté de démonstration extravertie et exacerbée, le public composé ce soir-là pour au moins d'un tiers de scolaires comprend dans l'instant les plages d'interactivité qui lui sont dédiées et sait respecter l'instant d'après le silence requis à la dramaturgie.

L'attitude provocatrice de Baal se traduit dans la scénographie de Julia Kratsova par une nudité affichée en étendard complaisant qui ne serait pas sans rappeler les happenings chers aux années soixante-dix pouvant laisser aujourd'hui un arrière-goût de désuétude à moins que le modernisme conceptualisé en soit l'enjeu?

Au demeurant une impression mitigée s'esquisse au terme de 3h30 de représentation avec entracte, mais que le tableau final saura balayer d'un revers esthétique à neutraliser toutes réserves inopportunes:

En effet le masque de Baal va s'imposer à tous, qu'on le souhaite ou pas.

Theothea le 12/10/06

DOLORES CLAIBORNE

de  Stephen King

mise en scène    Marie Pascale Osterrieth

****

Théâtre des Bouffes Parisiens

Tel: 01 42 96 92 42

 

     Photo  ©  Serge Kadoche  

     

Est-ce qu'une éclipse pourrait être une opportunité stratégique et convaincante de manière à déguiser le meurtre parfait d'un mari détesté, en accident sans témoin ? Cette question, l'inspecteur de police se l'est déjà posée vingt ans auparavant alors que le doute aura ainsi profité à l'accusée. Mais voilà donc qu'aujourd'hui à nouveau la gouvernante Dolorès se retrouve dans une conjecture similaire, puisque sa vieille patronne a fait une chute fatale de fauteuil roulant dont la cause reste à déterminer.

Dans les deux cas, une somme d'argent conséquente et même des valeurs immobilières restent à la clef d'une possible motivation lucrative.

Mais sont-ce effectivement ces mobiles apparents qui auraient pu pousser Dolorès à passer à l'acte criminel par deux fois à vingt années d'intervalle?

C'est donc sa version autobiographique concernant cette période qui va constituer la trame en flash-back du récit permettant de s'interroger sur la véracité des faits.

Le spectateur se trouve quasiment dans la même perspective que l'inspecteur (Simon Bakhouche) en écoutant attentivement Michèle Bernier raconter avec fougue toutes les tribulations d'une vie gâchée, semble-t-il, par son mariage malheureux.

En effet la dégradation des rapports amoureux initiaux aura atteint le point de non-retour lorsque fut découvert la liaison incestueuse que devait désormais subir leur fille Séléna (Magali Woch) sous la pression affective de Joe, le père devenu alcoolique.

C'est donc à l'éclairage de ces faits que la psychologie d'une épouse et mère en déroute, tentant de faire face à une situation rendue ingérable, devra s'esquisser pour évaluer sa détermination à capter l'héritage de sa patronne.... vingt ans plus tard.

L'interprétation de Michèle Bernier ne laisse aucun doute sur sa compréhension du personnage qu'elle sauve délibérément dans une bonne foi patente.

La mise en scène de Pascale Osterrieth concentre toute l'attention sur Michèle Bernier le plus souvent face au public au centre de la scène pouvant rappeller la prestation d'un one'woman show. Dans cette optique, ses cinq partenaires n'interviennent qu'à dessein d'illustrer les phases relationnelles déterminantes: Frédérique Tirmont y compose un savoureux portrait de Véra Donovan, la riche et vieille propriétaire. De même Serge Riaboukine sait rendre le rôle de Joe aussi pitoyable que nécessaire.

Au demeurant Michèle Bernier donne de la pertinence à "Dolorès Claiborne" en incarnant de manière toute charnelle la rage intérieure de son personnage.

Theothea le 21/10/06

LE GARDIEN

de  Harold Pinter

mise en scène    Didier long

****

Théâtre de L'Oeuvre

Tel: 01 44 53 88 88

 

     Photo  ©  Eric Devert 

     

Robert Hirsch est actuellement à l'affiche du Théâtre de l'Oeuvre et le moins que l'on puisse dire est que l'illustre sociétaire de la Comédie-Française semble à 81 ans se montrer particulièrement radieux d'y jouer sur scène.

Il faut dire que le fameux "Gardien" de Harold Pinter est une personnalité complexe à cerner à l'instar de ses deux acolytes qui lui servent à la fois de repoussoir et de faire-valoir.

A cet égard, la mise en scène de Didier Long place de fait le personnage de Davies (Robert Hirsch) en position d'arbitrage au mieux de ses intérêts immédiats en pratiquant l'exercice de la diplomatie associé à l'art de la roublardise.

C'est ainsi que l'inquiétude fomentée par le non-dit assourdissant de Pinter peut développer ici un humour comportemental qui n'appartient qu'à Robert Hirsh en une valse mimique évoquant toute l'histoire artistique de cet acteur à la fois funambule des mots et du geste.

Cependant Aston (Samuel Labarthe) et Mick (Cyrille Thouvenin) ne seront pas en reste pour cadrer l'intrigue préoccupante où est plongé le trio dans une atmosphère contradictoire et menaçante digne d'un roman noir, sans que l'on sache jamais lequel des trois est véritablement le plus dangereux pour les deux autres.

Pour situer à traits grossissants les faits et tempéraments en présence, le faux placide Aston aurait été lobomotisé, Mick le fébrile serait facilement influençable et versatile, quant à Davies le s.d.f. venu de nulle part, il s'installerait volontiers en gardien dans le domicile insalubre dont l'un des deux frères serait propriétaire.

En partant de cette relation tripartite, étrange et néanmoins conviviale, Harold Pinter réussit à brouiller les cartes du savoir-vivre pour les rendre fidèles à des pulsions individuelles trop humaines pour être démasquées !...

Un chef d'oeuvre de l'auteur anglophone qui a la vertu de laisser ouvertes les interprétations les plus paradoxales quant aux motivations de ces créatures dramatiques qu'ils laissent se débattre dans un tissu de malentendus plus ou moins feints.

Theothea le 17/10/06

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