Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

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12ème  Saison     Chroniques   12.16   à   12.20    Page  193

 

       

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LES CHAUSSETTES - OPUS 124

de  Daniel Colas

mise en scène  Daniel Colas 

****

Théâtre des Mathurins

Tel:  01 42 65 90 00

  

    Visuel affiche / photo © Serge Cohen  

Si les chaussettes trouées de Verdier (Gérard Desarthe) vont constituer une faute de goût rédhibitoire aux yeux de Brémont (Michel Galabru), c'est dans des costumes de clowns taillés sur mesure par Brigitte Faur-Perdigou et avec un nez rouge en trompe-l'oeil d'illustres comédiens "has been" que Daniel Colas a conçu ces séances de répétition d'un duo violon/contrebasse afin d'illustrer un conte de Noël pour artistes passés de mode tentant vaillamment d'assumer leur "contre-emploi" institutionnel prolongé.

Au théâtre des Mathurins, ce duel improbable entre deux représentants emblématiques des théâtres privés et subventionnés intrigue les esprits critiques de tout poil d'emblée contraints de se délester de leurs a priori persifleurs car pris à contre-pied d'une grille de lecture formatée.

C'est avec admiration que tous vont devoir célébrer cette pantomime musicale à deux voix contradictoires puisque paradoxalement complémentaires.

Dès la première seconde du spectacle, Michel Galabru cueille les spectateurs récalcitrants en faisant mine de sommeiller sur le plateau avant que d'accueillir en borborygmes Gérard Desarthe le metteur en scène/partenaire qui vient de lui proposer de l'accompagner dans l'aventure d'un spectacle poétique pour lequel il reste à convaincre un éventuel producteur.

Première lecture, premières interrogations, premières dissensions; ces deux-là ne se connaissent pas, si non par réputation et c'est donc par une sorte de nécessité naturelle qu'ils se trouvent réunis dans ce même projet, c'est-à-dire à cause d'une galère similaire, celle où il faut trouver par soi-même la force d'exister à ses propres yeux d'une part, et d'autre part au regard du public qui vous a d'antan adoré.

Mais si tout semble les séparer au niveau de la conception, de la perception, de la créativité, c'est instinctivement dans le registre médiatique qu'ils flairent tous les deux et chacun à sa façon que leur association pourrait avoir un impact fusionnel sur l'imaginaire collectif.

Aussi en alternant les rôles du maître et du disciple par lesquels ils flirteront allègrement tour à tour avec la discorde en humiliant et vexant le partenaire à qui mieux-mieux, c'est presque KO debouts qu'ils finiront par admettre que l'union de leurs qualités respectives prévaut largement à l'exaspération que peuvent susciter leurs défauts réciproques.

C'est donc une opportunité quasi magique que d'aller pouvoir applaudir ces deux "monstres de la scène" assumant avec humilité leurs statuts de saltimbanque tout en faisant surgir la sublimation fédératrice de l'acte artistique.

Theothea le 10/10/07

L'AUTRE

de  Florian Zeller

mise en scène  Florian Zeller 

****

Studio des Champs-Elysées

Tel: 01 53 23 99 19

  

    Visuel affiche / photo © Kate Barry  

Ce n'est plus son coup d'essai, mais est-ce pour autant un coup de maître ? En ce début de saison 07-08, Florian Zeller revient avec sa première pièce "L'Autre" créée au Théâtre des Mathurins en 2004 où Aurélien Wiik occupait déjà la place du tiers.

Mais cette fois-ci l'auteur prend la baguette du metteur en scène en offrant à Sara Forestier et Stanislas Merhar, l'opportunité de leur première approche professionnelle du spectacle vivant.

En cette circonstance, "Elle" et "Lui" vont devoir conceptualiser un jeu de rôles au sein duquel le troisième partenaire les empêchera de ressasser en rond.

Là où chez Feydeau le mari, la femme et l'amant jouent traditionnellement au chat et à la souris en une partie de cache-cache émoustillante pour les trois protagonistes, Zeller semble davantage fasciné par Pinter chez qui le tragique est au couple ce qu'un théorème est à l'évidence d'une application systématique de la loi.

Cependant Florian et ses personnages ont vingt-cinq ans à leur naissance théâtrale et c'est cette jeunesse qui deviendra en définitive le véritable enjeu dramatique car elle conçoit d'emblée que le Grand Amour est éphémère et ne pourra se satisfaire du train-train quotidien.

Va donc s'initier un cercle non vertueux où chacun, ami pour un oui, ou amant pour un non tentera de sauvegarder la passion en l'entraînant vers un ailleurs qui fatalement reviendra aux origines du conflit: "Je t'aime, moi non plus"

"La fascination du pire" étant donc plus que jamais au rendez-vous du trio amoureux au Studio des Champs-Elysées, l'arme fatale se dissimulera au coeur d'un romantisme forcené mais gangrené par une lucidité rédhibitoire en venant clore provisoirement par la pensée magique le mythe bien éprouvé de "Roméo et Juliette".

Theothea le 11/10/07

PUZZLE

de  Woody Allen

mise en scène   Sébastien Azzopardi

****

Théâtre du Palais-Royal

Tel:  01 42 97 40 00

  

     Visuel extrait affiche  

Sacré défi que d'assembler en flash-back les pièces d'un puzzle grandeur nature, avec autant de membres d'un pseudo choeur antique que de points de vue sur la vie, l'amour et le devoir qui incombent aux uns et aux autres selon la chronologie de la fortune ou ses revers.

De New-York à La Californie, c'est un monde en bascule que dissèque Woody Allen en auscultant le poids inhibiteur du versant Atlantique face à l'imaginaire créatif du pôle Pacifique.

Avec quelques aphorismes biens pesés en guise de viatique pour des éthiques personnelles en conflit d'intérêts, l'auteur se tourmente à peindre l'envol contrarié d'une progéniture ne trouvant pas son compte de passions dans les pas tracés à l'avance par ses géniteurs:

Ainsi "Vivre, c'est souffrir", "On ne choisit pas qui on aime", "La vie est une suite de chemins qu'on n'a pas pris", "Chacun étant le propre architecte du piège dont il se rend prisonnier, chacun est bien le seul à savoir comment en sortir", autant de sentences définitives que les uns opposent aux autres afin de justifier l'attitude qu'il faudrait accréditer pour parvenir à fédérer des ambitions contradictoires au lieu de faire imploser le schème familial mis à mal.

Sur la scène du Palais-Royal, tel un diapason incarné Sébastien Azzopardi donne le ton à un enchevêtrement psycho-socio-affectif sur lequel vont rebondir chacun de ses partenaires.

L'argent étant ici plus que jamais le nerf de la guerre, les liens familiaux se distendent et se compriment à tour de rôles, alors qu'Alma, la frangine (Anne Loiret), accumule en toute lucidité les expériences sans lendemain, que le père (Michel Aumont) se fait arnaquer par son comptable au point de faire faillite, que la mère est remplie de bonnes intentions se révélant néfastes, que l'oncle (Gérard Lartigau) nouveau riche rechigne à assumer ses racines, que Diane (Julie de Bona) sa maîtresse valse sur un volcan où la pulsion amoureuse se contredit avec l'idéologie capitaliste, il reste Eddie, le fils (Sébastien Azzopardi), pour faire front mais qui n'entend pas rester pieds et poings liés à une destinée tracée qu'il abhorre par avance.

Sur toile de fond d'une légende Holywoodienne que la mystification du 7ème Art colporte jusqu'à nos jours, les noms illustres du cinéma des années cinquante s'affichent en écran psychanalytique des pulsions de vie et de mort que chaque élément de la famile oedipienne s'emploie à distiller plus ou moins à son insu.

La renommée internationale cautionne au centuple l'hyper réussite sociale devenue projet individuel d'autant plus en point de mire que rendue inaccessible au commun des mortels.

Le show-bizz labélisé comme idéal universel rattrape ainsi par la manche chacun des protagonistes qui tenterait de se situer en deçà ou au-delà des normes établies pour la subsistance du sentiment généalogique.

Dans un décor où la machinerie s'apparenterait à la grande roue du destin, les cintres semblent effectuer une danse de Saint-Guy pendant que le plateau de scène tourne sur lui-même à l'infini tel un disque de vinyle enrayé.

La mise en scène tient le public en haleine, alors qu'Alma s'implique en observatrice depuis un "nulle part" d'où elle intervient en narratrice patentée du naufrage tribal annoncé.

Grave mais teinté d'un humour sans cesse sous-jacent, le diagnostic schizophrénique de Woody Allen trouve une résonance juste dans cette adaptation francophone face à un public plus fasciné que rieur, enclin à l'épanouissement paritaire de l'inné et de l'acquis.

Theothea le 12/10/07

KIRIKOU ET KARABA

de  Michel Ocelot

mise en scène   Wayne McGregor

****

Casino de Paris

Tel: 08 92 69 89 26

  

    Photo  ©  Vincent Muteau  

Hymne à l'Afrique ancestrale, le dessin animé de "Kirikou et la Sorcière" de Michel Ocelot en 94 est devenu une comédie musicale créée à Lyon en septembre 2007, prête désormais sous le titre de "Kirikou & Karaba" à faire l'évènement de cette fin d'année au Casino de Paris.

Présentée par certains comme la concurrente frontale du "Roi Lion" au Théâtre Mogador, c'est davantage l'émulation suscitée par ces deux spectacles innovants, chacun à leur souffle spécifique, qui retient l'admiration partagée au prorata des moyens mis en oeuvre et de l'inventivité spécifique requis par ces deux contes plongés au coeur du berceau culturel de l'humanité.

En ce qui concerne la mise en scène de Wayne McGregor, sa distribution est exclusivement noire afin d'incarner la population de ce village, du fin fond de la savane, épouvantée par les maléfices de Karaba la sorcière charismatique dont le tout jeune et impétueux Kirikou est décidé à mettre fin.

Ouverture et tolérance sont les principes directeurs, bel et bien à l'origine de cette démarche artistique dont les musiques de Youssou n'Dour contribuent largement à en authentifier le label fondateur.

Seule marionnette sur scène (atelier/ Simon Rann), Kirikou concentre tous les regards alors que trois manipulateurs à découvert (les jumeaux Taiwo Awaiye et Kehinde Awaiye, ainsi que Legrand Bemba-Debert) le suivent à la trace dans une chorégraphie époustouflante en se contorsionnant comme des fleurs de caoutchouc qui s'emmêleraient au mieux d'une sensualité pleine d'énergie farouche.

Aussi les yeux grand ouverts sur le monde, ce pantin judicieusement articulé canalise les ondes positives avec l'audacieuse candeur de nier la fatalité de l'ensorcellement des proches dont sa mère: Jessica "pookie" Tougloh, son oncle: Daniel Bilong, son grand-père: Umbam U Ksët ainsi que La femme forte: Sabine Pakora...

Devenu ce jeune homme (Legrand Bemba-Debert) ayant triomphé de l'adversité, sa réussite va éclairer d'un jour nouveau les relations humaines de fraternité et d'amour dont il deviendra un emblème universel en épousant Karaba (Fatoumata Diawara), l'ex-sorcière auparavant tant redoutée.

Lors du final empli de danses (troupe d'une vingtaine d'artistes), de couleurs (décor et costumes: Peter McKintosh) et de musique, la magie atteint son apothéose lorsque les enfants s'approchant du bord de scène tentent d'embrasser la marionnette porteuse d'un idéal aussi enthousiasmant.

Theothea le 16/10/07

CHAT ET SOURIS

de  Ray Cooney

mise en scène   Jean-Luc Moreau

****

Théâtre de la Michodière

Tel:  01 47 42 95 22

  

    Photo de répétition ©  Stewart Waughan  

Entouré de valeureux partenaires, Francis Perrin effectue un véritable one'man show au Théâtre de la Michodière dans ce "Chat et Souris" que Jean-Luc Moreau semble mettre en scène en direct puisqu'il ne cesse d'y renvoyer la balle en acolyte privilégié mais quelque peu distancié de ce vaudeville anglais délirant à souhait, signé Ray Cooney.

Marié respectivement à deux épouses Mathilde (Bunny Godillot) et Charlotte (Cécile Magnet), Jean Martin (Jean-Luc Moreau), chauffeur de taxi, mène une confortable double vie, lorsque les foudres d'internet vont tenter de court-circuiter son bonheur d'être papa d'une jeune fille Alix (Murielle Huet des Ausnay) à Montreuil ainsi que d'un garçon Guillaume (Benjamin Wangermee) à Ivry qui, jusque là bien entendu, ne connaissaient pas leurs existences réciproques et pour cause.

Cependant se rencontrant par hasard sur un forum de discussions sur le web, ces jeunes tourtereaux ont décidé de franchir une nouvelle étape en organisant un premier rendez-vous chez Jean Martin pour faire plus ample connaissance.

En cette perspective, l'homonymie paternelle révélée va déclencher un signal d'alarme maximum puisque non seulement les épouses ne semblent pas au courant de la situation conjugale illicite mais surtout les deux adolescents ne doivent pas envisager de relation amoureuse éventuelle puisqu'ils sont frère et soeur sans le savoir.

C'est un tiers (Francis Perrin), locataire vivant plus ou moins au crochet de Jean, mais au demeurant fort sympathique, qui va être mis à contribution pour gérer, arbitrer et néanmoins compromettre une conjoncture rocambolesque à la Feydeau où les portes claquent en suscitant alternativement des malentendus tout en feignant de résoudre temporairement les équivoques.

Les fausses pistes vont donc s'embrouiller au mieux avec les quiproquos dans une frénésie orchestrée par deux maîtres du genre, dont le démiurge ne sera jamais vraiment celui qu'on attend.

Il n'empêche que l'acteur/metteur en scène se trouve en position de faire-valoir et Francis Perrin en celle d'artiste jetant son va-tout à chaque virage dangereux; tous les deux s'accrochent avec une volonté exacerbée à cette réalisation qui a nécessité beaucoup de labeur et de mises au point selon les propos de J-L. Moreau.

Alors qu'en dernière partie, Marc Bertouni tire son épingle du jeu en grand-père qui n'a rien à perdre sinon le démon de midi, toute cette joyeuse équipe va se trouver bien récompensée par les spectateurs convaincus, à juste titre, d'avoir bien ri.

Theothea le 17/10/07

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