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Les    Chroniques    de

  

13ème  Saison     Chroniques   13.01   à   13.05    Page  206

 

 

61ème Festival de Cannes

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SANS MENTIR

de Xavier Daugreilh

mise en scène José Paul & Stéphane Cottin

****

Théâtre Tristan Bernard

Tel:  01 45 22 08 40

 

        Visuel affiche LD. Presse

Avec sa double casquette de metteur en scène et de comédien, José Paul est aux commandes d'une nouvelle comédie de Xavier Draugreilh où le mensonge se cultive en thématique qui se décline à travers six personnages se renvoyant leurs répliques en trompe-l'oeil.

Si "Sans mentir" rien ne serait arrivé, il faudra néanmoins convenir qu'en mentant durant une heure et demie, les trois couples à géométrie variable n'auront guère progressé au final dans la maîtrise circulaire de leur libido.

C'est cependant de la codirection d'acteurs où Stéphane Cottin et José Paul se complètent avantageusement que surgira un tonalité particulière, une manière approximative de mentir qui, à la fois, peut séduire et a le don drolatique de faire déraper en permanence les relations amicales ou sexuelles que les protagonistes entretiennent les uns par rapport aux autres.

Ainsi Lysiane Meis, Caroline Maillard et Isabelle Cote se relaient avec Eric Savin pour entretenir cette dose d'incertitude que le coup de foudre se doit de disputer au partenaire légitime.

Mais "Cyril" alias José Paul, ce démiurge circonstanciel étant dépassé par ses propres lacunes, la manipulation psychologique va tourner court au profit d'un jeu de dominos s'écroulant en cascade.

Au demeurant l'autre soir pour la Générale au Tristan Bernard, la salle, composée en majorité de gens du métier ainsi que de quelques critiques, s'affichait très bon public et riait sans relâche aux postures incongrues de la falsification des sentiments confrontés tour à tour à la lâcheté et à la candeur de l'alter ego.

A l'instar du Café théâtre, s'installait alors une proximité et une intimité entre la scène et les fauteuils distillant une franche rigolade plutôt bienvenue en cette rentrée théâtrale 08-09.

Theothea le 05/09/08

TANGUERA

de Diego Romay & Dolores Espeja

mise en scène Omar Pacheko

****

Théâtre du Châtelet

Tel: 01 40 28 28 40  

 

    Photo ©  Manuel Navarro de la Fuente

Tanguera ou l'addiction au Tango est en soi une invite à pénétrer les bas-fonds occultes qui ont fait émerger l'énergie d'une plainte charnelle au rang d'art chorégraphique dont l'Argentine peut s'enorgueillir à juste titre.

En voici donc la première comédie musicale qui revendique ce passage du spectacle traditionnel du Tango au récit d'une histoire simplissime où manichéisme et machisme se conjugueraient allègrement en clichés universels sur l'origine de cette danse à la fois résolue et lascive.

Investissant le théâtre du Châtelet pour trois semaines, à l'instar de "West side Story" la saison précédente et de "On the Town" à la fin de cette année, la pauvre immigrante Gisèle (Gabriela Amalfitani) y débarque sur ses planches en même temps que sur le port lugubre de Buenos-Aires pour y devenir l'enjeu convoité entre Gaudencio, le mac séducteur (Oscar Martinez Pey) et Lorenzo, l'amoureux intrépide (Esteban Domenichini) avec en toile de fond les Sharks et Jets locaux pour en assurer les combats de rue et en fomenter les rivalités de cabaret.

Sans recherche d'esbroufe spectaculaire, c'est la poigne sensuelle des corps s'interpénétrant au cordeau qui vont faire écran à toute diversion rédhibitoire et c'est dans la tension progressive des caractères affûtés à l'extrême que s'affronte la ferme souplesse des muscles pour toute réponse aux âmes en quête de dépassement de soi.

Entreprenant une tournée mondiale après 18 mois d'affiche à Buenos-Aires, ce show s'approprie, spécialement pour sa halte à Paris, un orchestre live discrètement installé avec ses treize instrumentistes en fosse d'avant-scène (Direction: Lisandro Adrover) pour le plus grand profit des vingt-trois comédiens-danseurs dont une chanteuse (Marianella) et uniquement trois chansons.

Une heure vingt de spectacle vous ramèneront à bon port avec la sensation esthétique d'être descendu au plus profond d'un duel de cordes (Miguel Angel Bertero, Sébastien Couranjou, Michael Gniest, Ludovic Michel, Lyionel Alemand & Domingo Jose Diani) avec un saxo (Fabian Dario Zylberman) et où les forces du bien et du mal auraient été emportées et ballottées par la mélancolie du piano (Mario Carlos Araolaza) en prise avec le langoureux bandonéon (Jean Henry Baptist & Facundo Torres).

Theothea le 08/09/08

MAMMA MIA

Le film   

de & mise en scène  Phyllida Lloyd

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Théâtre Mogador

 

    Photo:  Peter Mountain / Universal Pictures ©  2007 Universal Studios

Après avoir ensoleillé l'ouverture du 34ème Festival de Deauville, "Mamma Mia!" a enflammé le théâtre Mogador qui projetait en avant-première parisienne, sur un vaste écran numérique d'une luminosité exceptionnelle, le film d'emblée cultissime tiré de la célèbre comédie musicale regroupant les fameux succès du groupe pop Abba.

Meryl Streep en est la Diva tenant un gîte touristique délabré sur l'île de Skopelos rebaptisée par discrétion "Kalokairi", ce qui signifie "été" en grec. Avec Rosie (Juliette Walters) & Tanya (Christine Baranski), ses deux copines du bon vieux temps, celui du Flower Power, où elles formaient ensemble le groupe Les Dynamos, "Donna" l'ex-hippie a l'intention de fêter avec brio le mariage de sa fille Sophie (Amanda Seyfried) avec son Apollon (Dominic Cooper).

Celle-ci, comme beaucoup d'enfants nés de couples baby-boomer à la fin des libertaires années soixante, est non seulement à la recherche d'une image paternelle structurante mais surtout en quête de l'identité d'un géniteur qu'elle n'a jamais connu.

Cependant ayant eu l'audace de feuilleter le journal intime de sa mère rédigé à l'époque mouvementée de sa conception, trois prénoms de pères putatifs, Sam (Pierce Brosnan), Harry (Colin Firth) & Bill (Stellan Skarsgard) s'imposent à l'imaginaire de la jeune fille pour s'incarner par la suite en un jeu de rôles d'invités surprise aux noces afin que puisse se révéler celui qui pourrait posséder la légitimité de l'accompagner jusqu'à l'autel nuptial.

Construite autour des multiples tubes d'Abba sous des paysages paradisiaques, ce vaudeville post-moderne, dont l'ironie est hautement revendiquée par sa réalisatrice Phyllida Lloyd, va donc s'emballer sur des rêves éveillés où les idéaux de deux générations successives vont se confronter sous les aspirations des sexes opposés avec la menace ludique d'une frustration redoutée par tous.

Ainsi là où Sophie tente de se construire un avenir conjugal en recollant les morceaux du puzzle familial, sa mère fuit, en avant toutes, afin d'échapper aux déceptions encore douloureuses de ses amours d'antan restés en impasse.

Cependant depuis Zorba le grec, comme il est manifeste que dans la superbe aridité des Cyclades, les revers peuvent être sublimés avec maestria en délires salvateurs sous l'effet du Sirtaki, du Rebetika et de la Retsina, ici grâce à l'inspiration "Abba cool" de "Mamma Mia!", la somptueuse luxuriance des Sporades va allègrement relever le challenge de transformer en fantasmes kitsch et hallucinogènes, le retour du père prodigue sur cette île du second degré, voire plus.

C'est alors que sous l'impulsion opportune d'un tremblement de terre ravivant toutes failles mal colmatées, jaillira soudain la source précieuse d'Aphrodite qui inondera d'Amour tous ceux qui auront su se laisser apprivoiser.

Ce happening frénétique, où l'inconscient vient affleurer la pudeur de chacun en un rituel de compromis avec les pulsions du bonheur refoulé, va exploser littéralement sur l'écran en feux d'artifices pleins d'humour, d'ivresse et de sensualité pétillante.

En définitive, dans le film "Mamma Mia", le mariage le plus assuré de réussite, s'avérera être celui du style, entremêlant le fond et la forme pour le meilleur :

En effet, les sentiments s'y exacerbent au rythme de "Dancing Queen" ou autre "Gimme ! gimme ! gimme ! pendant que la satire s'y exerce dans la distanciation punchy d'un conflit de générations à contreemploi.

Ainsi pourra s'appliquer le dicton "Telle mère, telle fille..." en souffle exclusif de la passion lorsque le naturel reviendra au galop tonitruant.

Theothea le 09/09/08

SHITZ

de Hanokh Levin

mise en scène Cécile Backès

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Théâtre de la Pépinière Opéra

Tel:  01 42 61 44 16

 

  Photo ©  Patrick Henry

Avec le sous-titre " Guerre, amour et saucisson ", le dramaturge Hanokh Levin donne d'entrée le ton de sa perception du conflit des générations à l'intérieur de la famille de base qui pourrait se visualiser comme si la vie était une comédie musicale sordide et frénétique au service d'une lutte à mort.

Cependant les résistances de la part de chacun de ses membres étant démultipliées par la force du désespoir, la metteuse en scène Cécile Backès aura fort à faire pour rendre ceux-ci présentables au jugement populaire.

En effet, forte tête chacun de son côté, père, mère, fille et gendre voudraient volontiers disposer du beurre à leur propre avantage et conserver ou acquérir l'argent pour se garantir une survie.

A ce jeu du chacun pour soi, tous les coups seront permis et rien ne pourra arrêter la mécanique de l'intérêt subjectif forcément mal compris par autrui.

Ainsi au coeur d'une inadaptation généralisée, chacun étant le centre du monde, la disparition souhaitée de l'autre va devenir le gage illusoire d'une réhabilitation de son propre destin.

Setcha (Anne Benoît) & Shitz (Bernard Ballet), les parents souhaiteraient marier au plus vite Shpritzi (Salima Boutebal), leur fille boulimique qu'ils considèrent comme un fardeau rongeant leur couple. En retour, celle-ci n'aura que mépris et dédain pour ces vieux qui lui pompent l'air de sa jeunesse. Tchirk (Benoît Di Marco), le gendre ne visera, lui, qu'à l'héritage rapide des beaux-parents afin de rebondir dans des investissements lucratifs.

Cependant, ce sera la " loi du saucisson " qui aura le dernier mot, car cette morale populaire non écrite permet à l'individu menacé de se réfugier dans un quant à soi inexpugnable où la recherche d'une satisfaction personnelle, aussi moindre soit-elle, peut prendre les dimensions gigantesques d'une véritable raison de s'arrimer à la vie.

Et puis, ce sont les chansons accompagnées par la musique de Philippe Miller qui donneront l'opportunité au soprano sax Virgile Vaugelade ainsi qu'au contrebassiste Clément Landais de mettre du baume sur ces plaies généalogiques en distillant par la distanciation artistique une sorte d'état de grâce inattendue mais fort bienvenue que les acteurs attrappent au vol avec le talent de chanteurs en plein émoi rédempteur.

Theothea le 15/09/08

PERTHUS

de Jean-Marie Besset

mise en scène  Gilbert Désveaux                                                              

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Théâtre du Rond Point

Tel:  01 44 95 98 21

 

        Visuel dossier de presse Rond-Point  

L'étroitesse du col du Perthus entre la France et l'Espagne est à l'image du passage exigu entre l'amitié et l'amour nourri entre deux adolescents dans une petite ville de l'Aude au-delà de mai 68.

Sur cette ligne de démarcation maintes fois déclinée dans les textes de Jean-Marie Besset, vient ici se greffer une relation concomitante entre les deux mères de Paul & Jean-Louis.

En effet, face à l'absence patente des pères respectifs, l'ascendant matriarcal va prendre le relais afin de régner en toute fierté sur leur progéniture masculine.

Selon une idée ingénieuse de direction d'acteurs, le rôle dévolu à Irène et Marianne est confiée étonnement par Gilbert Désveaux à deux acteurs, Jean-Paul Muel et Alain Marcel.

Sur le plateau très intime de la salle Jean Tardieu, ce cocktail explosif réunissant quatre hommes, deux d'âge tendre, se débattant avec des émois sans référent structuré et deux d'âge mûr, palliant avec un orgueil ludique au déficit de présence paternelle, va entraîner l'intensité de l'enjeu psychologique sur le plan distancié de la comédie, bien retenue par les rênes de la mise en scène.

Autour d'un étrange ordonnancement de chaises musicales prenant tour à tour une taille géante ou lilliputienne, le ballet des quatre personnages de " Perthus " pourrait aisément, selon une vision fantasque, n'en former rapidement qu'un seul sorti d'un imaginaire proche, celui de Philippe Caubère jouant tous les rôles de sa biographie à la fois.

Ici chez Jean-Marie Besset, l'instauration d'une relation mère-fils dupliquée en contrastes affectifs et vulnérables autant qu'autoritaires et phalliques suscitent chez les deux garçons sur le point de passer leur baccalauréat, des pulsions contradictoires où le sentiment d'échec et d'autodestruction voisine allègrement avec celui d'impunité triomphante.

Cependant, de cette ville dont le prince n'est plus un enfant à celle où deux adolescents se débattent avec les frissons inconnus que l'étude scolaire de la " Princesse de Clèves " ne saurait épuiser au diapason du calcul des probabilités, il n'y aura pas d'alternative:

Nourrie à la mesure de sa propre frustration psychosociale, l'ambition de la mère à l'égard du fils projette celui-ci, pour le pire ou le meilleur, dans les tourments d'une destinée de substitution.

Accepter les règles implicites de ce jeu de rôles génétiques constituera pour Jean-Louis et Paul, chacun à leur façon, l'issue la plus adaptée pour recouvrer la cohérence avec soi-même.

Theothea le 16/09/08

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