Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

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14ème  Saison     Chroniques   14.66   à   14.70    Page  241

 

   

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MIAM MIAM

   

de & mise en scène  Edouard Baer

****

Théâtre Marigny

Tel: 01 53 96 70 00

 

  photo ©  Sylvain Granjon 

   

Edouard Baer est tellement doué qu’il ne résiste pas à scier la branche sur laquelle il ne voudrait surtout pas rester confortablement installé.

C’est donc, constamment, dans l’écartèlement de ses potentialités et autres talents que, considérablement à l’aise mais à ses risques et périls, il négocie avec toutes les formes de show.

Du « one man » jusqu’au « chef de troupe » via l’animation, il parcourt la gamme des prestations, lui permettant de slalomer entre des registres qu’il se garde bien de connaître par coeur.

Aussi, quand il écrit une pièce de théâtre, destinée à être jouée sur l’une des scènes parisiennes les plus éminentes, c’est, bel et bien, avec l’intention de ne pas être attendu sur le terrain des auteurs estampillés.

Ainsi, conscient qu’il est capable de tout, il préfère se donner l’image de celui qui touche à tout, sans jamais être jamais reconnu comme le spécialiste d’un genre catalogué.

Et cependant, plus ou moins à son insu, s’esquisse celui d’un artisanat en voie d’élaboration permanente qui n’aurait d’autre prétention que celle d’être le voyeur distancié d’un aboutissement artistique, peut être, redouté:

Edouard Baer chercherait, en permanence, à séduire mais il craindrait, par dessus tout, d’y réussir.

Alors, il cultive la culture de l’évitement, du décalage, de la pirouette, du double sens, du énième degré, bref de la malice en tout genre; il s’amuse et jongle, tout autant, avec le snobisme qu’avec le prosaïsme; il aime être ce funambule qui flirte, sans cesse, avec la catastrophe mais qui ne reste en équilibre que grâce à l’oeil qui frise.

C’est pourquoi avec « Miam miam », non seulement il préserve l’intégralité de son appétit mais, en démarrant, en trombe, dans un ersatz de vaudeville, il atterrit en douceur et profondeur, au music-hall en compagnie des prestidigitateurs et de leurs marionnettes, ainsi qu’au cirque, au milieu des clowns et des gentils petits cochons.

Si monter un restaurant surbooké, en lieu et place d’une pièce ringarde, dans un théâtre avide de remplir sa salle grâce à un public en appétence toujours renouvelée, relève d’un concept marketing en pleine ébullition, il est loin d’être absurde qu’Edouard Baer ait voulu relever ce défi, ciblant, parfaitement, la logique artistique du personnage médiatique qu’il s’est forgé.

D’ailleurs, qu’importe la pertinence du succès, puisque la jauge du théâtre Marigny est archi-comble et que ses neuf partenaires y trouvent, chacun à leur manière, leur compte de renommée.

En jouant sans cesse à - qui risque de tout perdre -, - gagne, toujours plus, que la mise -, Edouard Baer apparaît comme l’artiste du spectacle vivant, si non le plus drôle, à coup sûr, le plus surréaliste de son époque.

Theothea le 25/01/10

LES GARCONS ET GUILLAUME, A TABLE

de  Guillaume Gallienne

mise en scène  Claude Mathieu

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Théâtre de l'Athénée

Tel:  01 53 05 19 19 

 

  photo ©  Pacome Poirier / Wikispectacle 

   

Si, pour obtempérer à l’injonction familiale de convivialité, ses frères passent tout simplement à table, Guillaume, lui, pour être en phase avec l’intention présupposée, se met littéralement à table, afin d’extirper du sous-entendu maternel, tous les maux qui font mal à l’identité d’un enfant, en mal être.

Du non-dit homosexuel, il va se dénicher des accointances féminines qu’il pourra revendiquer a volo, afin de faire plaisir à une mère soi-disant frustrée de n’avoir enfanté que des fils.

Guillaume met, ainsi, en scène le rapport hautement privilégié qu’il entretient avec une mère adorée à l’instar d’un Marcel Proust, pareillement soucieux de la sienne.

Si, par extension, toutes les femmes de sa vie deviennent des relais à l’image séduisante et protectrice, l’adolescent va subir, de plein front, les foudres de ses camarades de jeu sur l’air de la tapette ou de la tantouse.

Par la suite, en raison de sa marginalité sociale avérée, le jeune homme sera confronté aux préjugés enclins à toutes formes d'exclusion.

Cependant, chez Guillaume Gallienne, ce processus va inverser tous les marqueurs habituels car, d'un point de vue subjectif, son homosexualité latente ne serait qu’un leurre ou plus exactement le fruit d’un fantasme comploté par autrui.

En effet, se voulant conforme à ce que la toute puissance maternelle et donc la société en son ensemble attendait de lui, dans le vaste jeu des rôles dédiés à chacun, Guillaume serait devenu, à ses corps et esprit défendant, le jouet d’un fâcheux malentendu dont seule, la psychanalyse pourra décrypter l’influence perverse.

Aussi, n’étant décidément pas la sœur de ses frères, il lui faudra remonter le cours du temps dévastateur et prouver, à qui en douterait encore, que la passion amoureuse était à portée hétérosexuelle du Guillaume rêvant, secrètement, d’être, à la fois, l'objet idéal du désir maternel en même temps que le héros de la conquête conjugale.

Afin donc de sortir, par le haut, d’une situation identitaire inextricable, la pratique du théâtre va s’offrir, à proprement parler, sur un plateau, en lui proposant d’être, en puissance, un autre que soi-même.

Ainsi, en composant le personnage qu’il n’est pas, tout en négociant habilement avec la schizophrénie, le comédien découvre un point d’appui solide, le temps de la représentation, pour extérioriser la terreur nihiliste et faire preuve, dans la distanciation du talent, de sa capacité à exister dans le regard d’autrui.

Cela dit, le stand up de Guillaume Gallienne n’a rien d’une tragédie psychiatrique ni même d'une typologie clinique, puisque le public, qui ne s’y trompe pas, rit et applaudit, à chacune de ses intonations, mimiques ou autre poses que plus de dix années de carrière à la Comédie-Française lui permettent de maîtriser dans l’excellence comique de l’autodérision.

Theothea le 23/01/10

CASIMIR & CAROLINE

de  Ödön von Horvath

mise en scène  Emmanuel Demarcy-Mota

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Théâtre de la Ville

Tel:  01 42 74 22 77

 

  photo ©  Jean-Louis Fernandez 

   

LA PIERRE

de  Marius von Mayenburg

mise en scène  Bernard Sobel

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Théâtre de La Colline

Tel: 01 44 62 52 25

 

  photo ©  Elisabeth Carrechio

   

Assis le long de l’avant-scène l’autre soir, l’ensemble de l’équipe artistique, emmené par Bernard Sobel micro en main, répondait aux interrogations du public à l’issu de la quatrième représentation, au Théâtre de la Colline.

« La Pierre » est un poème; en tout cas l’ex-directeur du Théâtre de Gennevilliers perçoit le texte de von Mayenburg comme un outil métaphorique et universelle de la mémoire, bien davantage à une reconstitution historique et identitaire des pérégrinations de l’Allemagne contemporaine.

Autour d’une thématique de la maison familiale où se succèdent, selon les convulsions géopolitiques de 1935 à 1993, les maillons d’une chaîne d’occupantes qui, de bon droit, expulsent, de fait, les précédentes, l’auteur recompose le puzzle par lequel, la conscience, bonne ou mauvaise, vient buter contre les ombres de l’inconscient et les fantômes de la culpabilité.

En effet, il ne suffit pas de sublimer une cause ou de se mentir à soi-même pour que de grand-mère à petite-fille en passant par la mère, l’esprit de famille soit absout des frustrations ou même du malheur engendré chez l’alter ego qui aura été dépossédé du gîte, fût-il situé à l’Est du mur de la honte.

Quatre repères symboliques serviront de cadre à une dramaturgie défiant la chronologie, à l’instar des souvenirs récents ou lointains qui s’associeraient dans une anamnèse:

Une lettre, une balançoire, un piano, et bien entendu la fameuse pierre.

Jonglant avec ces traces mnémoniques, les protagonistes féminines Mieze (Anne Alvaro), Heidrun (Claire Aveline), Hannah (Priscilla Bescond), Stefanie (Anne-Lise Heimburger) et Witha (Edith Scob) vont effectuer une danse du scalp, d’essence psychanalytique, d’où leur unique partenaire masculin, Wolfgang (Gaëtan Vassart), s’exclura lui-même du jeu vital.

Ainsi de confiscation en appropriation, d’acquisition en restitution, de fragmentation en récupération, la transmission de la mémoire va s’effectuer cahin-caha entre les générations qui tentent, chacune à leur tour de s’arranger avec le mensonge explicite autant qu’avec l’aveu implicite.

Sans jugement moral de l’Histoire, Bernard Sobel s’associe à Marius von Mayenburg pour se glisser dans le schéma mental d’une généalogie féminine, en charge de faire sens avec les paradoxes humains de la prise de conscience.

Cependant, au bout d’une heure, l’autre soir, le débat se terminera sans qu’aucune des comédiennes de cette création théâtrale n’ait eu l’opportunité de prendre la parole.

Theothea le 22/01/10

TOUT LE PLAISIR EST POUR NOUS

de  Ray Cooney & John Chapman

mise en scène  Rodolphe Sand

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Théâtre Rive Gauche

Tel: 01 43 22 11 02

 

  photo DR.

   

Tout le plaisir est pour qui, en définitive ?

Une heure et demie plus tard, les spectateurs du Théâtre Rive Gauche sont convaincus que les huit comédiens sont fort sympathiques, que l’intention du metteur en scène est de vouloir les faire rire à un rythme d’enfer, que les auteurs anglais sont des spécialistes de la comédie de boulevard, bref que tous participent à la réussite d’une sacrée soirée.

Mais si derrière ce plaisir annoncé, devait s’être dissimulée une agitation excessive au service d’une adaptation française (Sébastien Castro) mal ficelée et trop approximative dans des répliques destinées à faire mouche, comment qualifier cette sensation de désagrément risquant davantage de tétaniser que de détendre ?

Et si la direction d’acteurs, trop univoque, avait installé, d’emblée, une fébrilité dont l’excitation aurait, sans doute, gagné à ne monter en puissance qu’au fur et à mesure des quiproquos, quel impact comique pourrait-il être garanti?

En effet pour que l’hystérisation d’une situation vaudevillesque fonctionne, encore faut-il que tous les éléments qui y concourent, ait eu l’opportunité d’être mis en place dans l’entendement du public, afin que celui-ci soit prêt ensuite à tous les dérapages relationnels ainsi qu’à la bienvenue du délire attendu, au coin de l’exacerbation des amours illicites.

C’est alors que le surgissement de Anne-Suzie Bouillon de Chazourne (Laurence Badie), écrivain candide à souhait, proposant son futur ouvrage à succès, auprès d’un éditeur (Thierry Redler), complètement dépassé par l’imbroglio sexuel en gestation sous son toit avec la complicité ingénue de son épouse (Virginie Lemoine), pouvait, en effet, être en mesure de susciter le paroxysme de l’hilarité.

Certes, l’objectif des deux auteurs Cooney & Chapman est manifeste mais, faute de pertinence in situ, la réalisation de Rodolphe Sand effleure sa cible artistique.

Theothea le 28/01/10

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