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15ème  Saison     Chroniques   15.001   à   15.005    Page  254

 

   

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THEA BLOGS                    Recherche   par mots-clé                    THEA BLOGS          

STRICTEMENT AMICAL

de Sylvie Blotnikas

mise en scène:  Julien Rochefort

****

Théâtre de Poche Montparnasse

Tel:  01 45 48 92 97   

 

      photo ©  Lot  

       

Pour débuter la rentrée théâtrale, rien de tel qu’une pièce subtile dont, pour sûr, la complexité contradictoire des sentiments va nous poursuivre tout le long de la saison, sans que personne et donc sans qu’aucun critique n’en trouve la clef définitive…. car il ne saurait y en avoir une.

En effet, imaginons que Sophie et Gilles soient frère et sœur, que les hasards de la vie les aient entraînés à vivre sous le même toit, qu’ils aient beaucoup d’égards l’un envers l’autre.

Ainsi brossée, une telle relation pourrait être proche de l’inceste familial, sans que pour autant, aucun lien charnel ne soit manifeste dans leurs propos attentionnés.

D’ailleurs, dès que l’un et l’autre auraient l’opportunité d’une rencontre à l’extérieur, leur intérêt affectif redoublerait en perspective d’une potentielle aventure, voire d’un véritable amour.

Mais rien de plus légitime, puisque ici dans cette pièce, Sophie (Sylvie Blotnikas) et Gilles (Julien Rochefort) ne sont pas frère et sœur, mais bel et bien des ex. que la vie amoureuse a délibérément séparés mais qu’elle a aussi rapprochés de nouveau, à la suite d’un deuil, celui d’un ami intime de Gilles, devenu entre temps l'époux de Sophie avec laquelle il eut deux enfants.

Donc, voici nos ex. accompagnés d’un douloureux secret, vivant désormais en amitié, parce qu’incapables de transgresser la fidélité à la mémoire et surtout ne le souhaitant pas.

Julia (Guilaine Londez) et Gaspard (Frédéric Rose) auront beau jeu de les divertir de cette paralysie libidinale, cependant leurs approches, puis leurs retraits respectifs ne seront pas en mesure de rivaliser avec l’abîme qui réunit tout en séparant Sophie à Gilles.

Pour ce couple, puisqu’à tout le moins, ceux-ci donnent l’apparence d’en être un au regard d’autrui, s’incarne en eux l’élégance du respect et de la prévenance à l’autre; ce qui pourrait se révéler être la vertu essentielle de toute union conjugale!... à moins qu’une clef alternative puisse se superposer à cette interprétation trop prosaïque, celle d’un indicible second degré par exemple, visant juste au cœur de l’écriture de Sylvie Blotnikas.

Theothea le 07/09/10

J'AI DEUX MOTS A VOUS DIRE

de   Jean-Pierre Delage

mise en scène:  Jean-Paul Bazziconi

****

Théâtre  Rive Gauche

Tel: 01 43 35 32 31 

 

      visuel affiche

     

Une silhouette de Pénélope, un maintien de danseuse, une bouille farceuse et un esprit amusé, Sabine Paturel a tout d’une grande !…

Si elle avait deux mots à nous dire, on la croirait sur parole mais il s’agit d’une simple figure de style pour amorcer le contact et susciter l’envie de venir l’applaudir puisque la chanteuse-comédienne nous propose, en fait, une adaptation toute personnelle d’une pièce de Jean-Pierre Delage créée en son temps par Jacqueline Maillan.

Prétexte à une comédie musicale à un seul personnage, le come back sur scène d’une artiste, après une traversée du désert quelque peu dépressive, est l’occasion d’un tour de chants à la bonne franquette en guise de répétitions à un spectacle de retrouvailles avec le public.

Cependant comme Sabine ne fait que « des bêtises », les spectateurs seront complices de tant d’ingénuité malicieuse que celle-ci semblerait avoir décidé, une fois pout toutes, de ne pas se prendre au sérieux.

De surcroît, la qualité musicale de l’orchestration est également convoquée sur les planches du Rive Gauche, sous la direction de Samuel Sene, en même temps que la posture d’un stand up décontracté.

Sabine, dans un décor kitsch et pop, s’évertue à renvoyer d’incessants appels téléphoniques dérangeants, dans l’orbite humoristique des opportunités ravageuses à tourner en rond, et tente de surmonter, avec une naïveté feinte, le stress d’une pente artistique à rebours vers le triomphe parisien.

Rôle de composition, bien entendu, que tous, y compris les six musiciens qui se relaient, en alternance, autour d’elle, auront interprété comme la légitime espérance d’une artiste se présentant en jean, chemise blanche et cravate à la garçonne…. mais surtout drôlement bien dans sa tête !

Theothea le 07/09/10

SOLNESS LE CONSTRUCTEUR

de Henrik Ibsen

mise en scène:  Hans Peter Cloos

****

Théâtre Hébertot

Tel:  01 43 87 23 23 

 

      Affiche /  photo ©  Laurent Speller (vu intégral)

        

Weber & Doutey, ces deux-là sont sur le plateau de l’Hébertot pour le meilleur d’eux-mêmes, renvoyant les cinq rôles secondaires aux utilités du texte d’Ibsen que Hans Peter Cloos semble réduire délibérément… à du poil à gratter.

S’il est quelque peu étrange de faire appel au talent mythique d’Edith Scob, alors que celle-ci doit se vouer au double déni de briller à la fois en tant que femme et en tant que comédienne, il est non moins enchanteur d’apprécier, en gros plan, le couple vedette hors de toutes autres conjonctures relationnelles.

De Jacques à Mélanie, le courant artistique passe à un tel point qu’il est fort peu aisé d’en déduire à qui profite davantage l’opportunité de leur rencontre sur scène, initiée par Hans Peter Cloos.

Jacques Weber qui donne souvent l’impression d’être oppressé par la charge de son savoir-faire, gagne ici, beaucoup, à se laisser envahir par les composantes enjôleuses et ludiques de sa partenaire; quant à Mélanie Doutey, elle porte, par un jeu extraverti dirigé de main de maître, la qualité de leur duel complice à la hauteur de l’état de grâce.

Dans ce registre favorable aux numéros d’acteur, qu’en est-il de Solness, ce constructeur de génie, devenu paranoïaque face aux forces de la jeunesse suspectées de vouloir le déloger de sa position dominante ?

Une lecture à front renversé de la pièce d’Ibsen pourrait, sans doute, éclairer le point de vue implicite de Hans Peter Cloos:

A son insu, ce serait Hilde qui mène le bal, toute emportée par la puissance inexorable d’un rêve à construire autant qu’à réaliser jusqu’aux conséquences ultimes de l’ambition.

En effet, au pays des merveilles, quoi de plus légitime que de vouloir se faire offrir un royaume doté d’un incontournable château tout auréolé de joyeux nuages ?

Et qu’importe le vertige chronique de Solness, si la spéculation de leur bonheur ne devait tenir qu’au défi d’aller coiffer la tour la plus haute d’une couronne de fleurs, gage de la toute puissance de leur fascination mutuelle?

Dans un décor de Jean Haas où une palette hyperréaliste de noirs et de blancs induirait l’esquisse d’un bureau d’architecte, en morphing d’un carrosse de bal pour l’au-delà du miroir, les voilà donc embarqués dans un délire jubilatoire dont ils vont partager l’enivrante addiction avec les spectateurs, en retardant le plus longtemps possible le réveil redouté au cœur d’une chute onirique sans fin…

Theothea le 16/09/10

NONO

de  Sacha Guitry

mise en scène:  Michel Fau

****

Théâtre de La Madeleine

Tel:  01 42 65 07 09

 

      photo Marcel Hartmann   ©   Getty images 

       

Ecrit à dix-neuf ans en une matinée estivale à Saint-Valery-en-Caux, le premier acte de « Nono » était alors conçu par Sacha Guitry comme un « lever de rideau » qui précédait souvent, avant-guerre, la représentation d’une soirée théâtrale.

Cependant, sur des conseils amis et plus ou moins avisés, le jeune auteur allait compléter par deux actes supplémentaires, l’écriture de sa première pièce qui fut, ainsi, créée le 6 décembre 1905 au Théâtre des Mathurins.

Entrée dans le monde parisien sous un concert critique très favorable, la renommée du fils de Lucien Guitry se plaçait d’emblée sous des auspices prometteurs.

De Blanche Toutain à Julie Depardieu, en passant par Yvonne Printemps, le rôle d’Antoinette Berger, dite « Nono », se doit d’être interprétée avec l’aura d’une candeur feinte quant aux ravages qu’elle suscite non seulement dans la gente masculine, mais tout autant auprès de sa ou ses rivales féminines.

Le rôle de Madame Weiss (ici Brigitte Catillon), de 18 ans l’aînée de Nono, vient en contrepoint flatter le machisme mondain de Robert Chapelle (ici Michel Fau), l’amant blasé par un amour encombrant qui l’empêcherait de renouveler la jeunesse de ses conquêtes.

D’un coup d’essai à la mesure d’un coup de maître, la valeur n’avait pu attendre le nombre des années que Sacha mettrait, de toutes façons, à profit pour peaufiner la guerre des sexes qu’il ferait sienne jusqu’à lui octroyer toutes les associations d’un esprit prêt à se damner pour le bon mot à venir.

Prenant à son compte les frasques spirituelles et non moins charnelles du Guitry débutant, le comédien Michel Fau impose son personnage lunaire, composite d’une fixité à la Buster Keaton revisitée par l’inspiration habitée d’un Jean Guidoni, afin de contraindre sur scène le metteur en scène éponyme à jongler avec les forces antagonistes de trois couples potentiels, ceux des nouveaux et anciens amants face à celui singé en miroir par les domestiques.

Alors, comme un dandy en diable surgissant d’une boîte à surprises toujours renouvelées, Xavier Gallais alias « Jacques Valois » pourrait tirer les marrons du feu de l’amour qui, sans cesse, le courtise mais constamment le diffère de Paris à Trouville, et vice versa.

Légères comme les bulles d’un Champagne demi brut, les paillettes « Belle époque » des costumes (David Belugou) enivrent le décor (Bernard Fau) à double détente, entre grand restaurant et villégiature balnéaire, dans l’écho mythique de la « Putain sublime » qu’elle puisse se nommer « Lolita », « Lulu » ou autre « Nana ».

Theothea le 21/09/10

LE TECHNICIEN

de Eric Assous

mise en scène:  Jean-Luc Moreau 

****

Théâtre du Palais Royal

Tel:  01 42 97 40 00   

 

      photo ©  Bernard Richebé  

   

Après dix années de carrière en solo respectif, le couple Giraud-Jansen à la ville se reforme à la scène, celle prestigieuse du Palais-Royal.

Maaïke et Roland ont emmené dans leurs bagages de saltimbanques, leur fidèle complice Jean-Luc Moreau à la direction d’acteurs ainsi que l’auteur à succès récurrents, Eric Assous.

Fort de cet équipage gagnant-gagnant, six autres comédiens viennent les relayer dans un tourbillon de quiproquos où deux ex., séparés par vingt-cinq années de destin individuel, se retrouvent subitement confrontés à des retrouvailles où la hiérarchie professionnelle est en butte aux regards croisés des collaborateurs.

En effet, devenue directrice d’une maison d’édition littéraire, Séverine Chapuis règne en maîtresse femme sur un microcosme où l’intuition doit s’emboîter avec les « bons coups » médiatiques alors que le flair doit protéger des risques de mauvaise fortune.

Mais comment maîtriser la situation totalement inattendue du retour inopiné de l’ex-conjoint « has been », alors même que Séverine s’est remise en ménage, apparemment heureux, avec Patrice, son manager de publication ?

Voici donc Jean-Pierre Chapuis promu technicien de surface, autrement dit en position d’« homme à tout faire », fonction pour laquelle celui-ci, pour son profit, ne va pas tarder à imaginer les prérogatives.

Il suffirait peut-être d’une assistante peu scrupuleuse en amour, d’un fils caché monté sur patins à roulettes, d’un directeur de lecture à inclinations hors sujets, pour que le cheptel « maison » d’écrivains « petites plumes » s’enraye dans la machine à produire du best-seller.

C’est alors que JP, sous le très discret pseudo d’« Auguste » , armé de son matériel d’entretien et de nettoyage au Karcher pourrait, sans doute, être tenté de faire chanter tout ce beau monde.

C’est peu de dire que Maaïke Jansen règne en grande instigatrice des chassés-croisés et autres imbroglios cocasses, insufflant à tous ses partenaires le surcroît d’énergie qui fait le bonus d’une comédie.

Roland Giraud, un peu comme à guignol, saisit les opportunités de tirer la couverture à lui, mais laisse volontiers à son épouse-comédienne, la juste reconnaissance du talent exceptionnel.

Ainsi complices, en se passant le témoin, du stylo au balai-brosse, le couple Girand-Jansen renvoie au public, l’image d’un jeu de rôles truculents assumés jusqu’aux confins du professionnalisme.

Theothea le 22/09/10

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