Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques    de

  

15ème  Saison     Chroniques   15.071   à   15.075    Page  268

 

                 

         

L'étrange affaire Angelica    -   mise en scène:  Manoel de Oliveira -  Un certain regard / Cannes 2010

       

 R E V I V A L

Wight ! 40 années après

     

63ème Festival de Cannes 2010

et son théâtre d'ombres

     

Les  MOLIERES  2010 

Les Nominations

Point de vue

L'Album Photos de Theothea

           

Toutes nos  critiques   2010 - 2011

Les Chroniques de   Theothea.com   sur    

   

THEA BLOGS                    Recherche   par mots-clé                    THEA BLOGS          

AU NOM DU FILS

de  Alain Cauchi   

mise en scène: Etienne Bierry

****

Théâtre de Poche Montparnasse

Tel:  01 45 48 92 97   

 

         photo ©  Lot  

       

Ne nous y trompons pas, cette histoire de famille à la sauce méditerrannéenne et même d’origine italienne ne s’enveloppe de l’accent marseillais que pour mieux mondialiser l’enjeu psychanalytique de l’héritage paternel.

Celui-ci à peine refroidi au cours naturel de son sommeil, voilà que ses deux fils (Alain Cauchi & Hervé Falloux), leur sœur (Cécile Sanz de Alba) , leur mère (Andrée Damant) et une belle-fille (Fabienne Chaudat) se retrouvent dans la masure familiale des bords de calanque pour des retrouvailles ombrageuses après tant d’incompréhension mutuelle.

Cependant, si tous les griefs accumulés semblent propices à une explosion du noyau nucléaire censé les unir, c’est par vagues concentriques de vérités stratégiques et de mensonges attentionnés que l’auteur va les immerger dans une dynamique de groupe dont, par effet de perspective, deux « psy » vont tirer, en coulisse, les ficelles pulsionnelles.

Chacun des protagonistes constituant une facette du puzzle de cette famille « Tuyau de poêle », si représentative des modèles standards lacaniens, tous vont y aller de leurs reproches, du dénigrement, de leur mystification comme de leur (auto)dévalorisation.

Quoi de plus normal que de jouer avec les culpabilités respectives, quand l’un sort de prison, l’autre se prostitue, un troisième serait prêt à occire la terre entière pour assurer sa réussite matérielle, et que la Mama serait encline à la mauvaise foi systématisée ?

Cependant le secret du spectacle se dissimule au sein d’une écriture hyper « consciencieuse » qu’une direction d’acteurs constamment « réservée » maintient à distance du grand chambardement des « egos » au profit d’un ton détaché, primesautier et même très affectif !

Alors, comme si la recette de la bouillabaisse prenait valeur universelle, cette cure de psychanalyse collective, à l’occasion de la disparition du pater familias, va faire imploser la soupape des résistances à toute prise de conscience des composantes dérisoires d’un conflit généalogique lambda.

Le rire et le sourire sont donc sans cesse conviés à ce banquet fusionnel « ave l’accent » empathique et compassionnel.

Theothea le 04/03/11 

LES GRANDES PERSONNES

de  Marie NDiaye   

mise en scène: Christophe Perton

****

Théâtre de la colline

Tel:  01 44 62 52 52   

 

         photo ©  Elizabeth Carrechio

   

Trois enfants devenus adultes se trouvent confrontés au déni parental d’accepter leur statut d’êtres à part entière, c’est-à-dire autonomes dans leur amour filial comme dans leurs points de vue sur la famille socioculturelle.

Dire que l’incompréhension est au cœur du malentendu régissant le malaise respectif, le mal de vivre, l’inadaptation renvoyés comme un boomerang culpabilisant d’une génération à l’autre, et réciproquement, ne pourrait guère s’apparenter à une posture défensive mais bel et bien à une autodestruction collective.

En effet, chacun, en tentant de sauvegarder ses convictions affectives et morales, scie le socle généalogique reliant ascendance et descendance en une même entité protectrice.

Voilà donc des parents totalement désarmés face à la perte de la meilleure partie d’eux-mêmes; voici la géniture étouffée dans l’œuf avant que de voler de ses propres ailes.

Le temps ne fera rien à l’affaire, car la souffrance de l’inconscient martèle hic et nunc, aujourd’hui comme autrefois, que le paradis perdu n’a jamais existé et que dans le meilleur des cas, il ne s’agissait que d’un mirage, que d’une perspective fallacieuse destinée à nuire à l’enfant et à aveugler les grandes personnes.

A partir de ce constat amère, Marie NDiaye transpose sur le plan littéraire, poétique et désormais théâtral, le cortège de déviances issues directement du conflit psychique, en puissance intransgressible.

Que l’une se suicide, que l’autre devienne violeur pédophile, que le troisième renie son adoption déracinante, tous seront les porte-parole significatifs d’une incommunication inéluctable.

Il ne leur restera que le come-back symbolique sous l’apparence de spectres pour tenter de faire bonne figure auprès de parents figés à jamais dans leur projet de progéniture idéalisée.

Pas de happy-end dans cet univers où des vautours empaillés menacent le décor quotidien misérabiliste au point de rendre inquiétante la mise en scène lorsque celle-ci décide de lâcher dans la salle un oiseau de proie vivant… certes bien apprivoisé, lui !

Theothea le 08/03/11

LE PRENOM

de  Matthieu Delaporte & Alexandre de la Patellière

mise en scène: Bernard Murat

****

Théâtre Edouard VII

Tel:  01 47 42 59 92   

 

         photo ©  Marianne Rosensthiel  

   

En ce début mars, bat le plein des « corporatives » permettant aux membres de l’académie des Molières d’assister aux spectacles en liste pour l’édition 2010-11.

Concernant « Le Prénom » dont la prolongation jusqu’en juin est la meilleure confirmation du succès public de cette première pièce de théâtre écrit par le duo Delaporte & de la Patellière, une représentation dominicale exceptionnelle était, donc, organisée à l’intention des professionnels du spectacle vivant, en présence des auteurs et de Bernard Murat, le metteur en scène.

Ainsi, précédant une ultérieure retransmission télévisée en direct et le tournage d’un film dédié, l’opportunité de participer au concert général de louanges entourant désormais cette création du Théâtre Edouard VII, se traduisait effectivement par des salves de rire intensives et progressives ainsi que par de multiples rappels sous les applaudissements réjouis.

Oui, mais comme le regard de la critique est par nature, subjectif, le nôtre, allez savoir pourquoi, semblait diverger de l’orbite nominale.

Sans y mettre une quelconque malignité, l’engouement général ne nous montait pas à la tête et du fond de l’orchestre, l’agitation scénographique nous apparaissait, de loin, factice au beau milieu des éclats de rire si proches mais si peu communicatifs à nos références sensorielles.

Certes, le linge sale lavé en famille là-bas sur les planches de l’Edouard VII n’était pas nécessairement incongru, mais le fait qu’il fût surjoué à l’excès entraînait comme un déphasage entre la stigmatisation implicite de son idéologie « bobo » d’avec sa complicité à l’égard d’un jeu de massacre sociétal exclusivement simulé, au lieu que d’être existentiel.

Autrement dit, en s’emparant du ressentiment familial latent et forcément violent, les auteurs faisaient feu d’un sujet pertinent et légitime mais en le réalisant aux confins de la caricature et du cliché au détriment du témoignage parodique, il semblait que fût favorisé le défoulement du public plutôt que son humour.

Alors ok, la recherche d’un « prénom » était effectivement une excellente entrée en matière initiée par le rôle de Patrick Bruel afin de favoriser le débat contradictoire sur les goûts et les couleurs de chacun, mais encore aurait-il fallu ne pas chercher à y intégrer, dans un amalgame systématique, le catalogue de toutes les déviances répertoriées du couple contemporain, au risque précisément d’y perdre l’âme du spectateur et sa crédibilité interactive.

Bien entendus, les rires par vagues impressionnantes étaient là pour nous rappeler que l’objectif primordial de divertir ses semblables était atteint dans ses grandes largeurs, mais pas sûr néanmoins qu’il le fût réellement en profondeur.

Gageons, toutefois, que « Les Molières », gagnés par l’exaltation collective, sauront ne pas lui en tenir rigueur.

Theothea le 07/03/11

QUELQU'UN COMME VOUS

de  Fabrice Roger-Lacan

mise en scène: Isabelle Nanty

****

Théâtre du Rond-Point

Tel:  01 44 95 98 21   

 

         photo ©  Giovanni Cittadini Cesi

   

Pour un coup d’essai, c’est un coup de maître !…

Jacques Weber est un sacré routier du spectacle vivant, et lui, c’est sûr, n’est pas un néophyte. Isabelle Nanty, elle, enchaîne les mises en scène avec réussite depuis 91, quant à Fabrice Roger-Lacan, l’auteur en est à sa quatrième pièce créée sur scène, après « Cravate club » (C.Berling/E.Baer), « Irrésistible » (V.Ledoyen/A.Elmaley), « Chien-chien » (E.Navarre/A.Taglioni).

Alors, quel serait donc ce nouveau maître qualifié par I.Nanty d’ « insolent avec une gueule d’ange » dans le dossier de presse du Rond-Point ?

Quel est ce jeune chanteur à succès qui, s’essayant à jouer sur les planches avec le texte d’un autre, face à un partenaire d’expérience, suscite l’immédiate présence de celui qui serait en terrain de prédilection ?

Connu sous le nom de « Bénabar », Bruno Nicolini est, assurément, une véritable révélation pour le théâtre.

D’emblée, de plainpied avec Jacques Weber en grand patron s’autorisant une parenthèse de farniente, le second endosse la panoplie d’un mafioso déguisé en touriste balnéaire.

Toutefois, sur cette plage de sable fin, déserte à perte de vue, tous deux en costume de ville et lunettes noires, contrastent avec la quiétude de ceux qui seraient venus en chercher satisfaction dans la solitude.

Pourquoi, en effet, dans cette immensité offerte, aller placer sa serviette de bain juste auprès de celle qui s’y trouve déjà ?

Sans gêne notoire ? Drague ostentatoire ? Provocation gratuite ? Ou autre version d’un sombre contrat sur la tête d’un personnage non identifié ?

Pour un Oui, pour un Non, tout pourrait basculer dans le tragique, si d’emblée les protagonistes ne semblaient baigner dans un état de grâce où, comme au jeu d’échecs, seul compterait d’apprécier la partie, plusieurs coups en avance sur l’adversaire.

C’est ainsi, qu’avec des manières distinguées à l’aune du savoir vivre, chacun des deux va tracer son territoire personnel d’où il pourra envoyer des messages codés à son partenaire de circonstances… pour le moins surréalistes.

Selon les règles psychanalytiques de l’association libre, l’auteur va répondre aux questions prosaïques par des interrogations métaphysiques que ses créatures dénommées « Quelqu’un » et « Quelqu’un d’autre » se disputeront jusqu’à plus soif… dans la vacuité de ce désert, ô combien emblématique.

A chacun d’y mettre le sens souhaité ou d’y trouver son héros.

Theothea le 09/03/11

POUR L'AMOUR DE GERARD PHILIPE

   

de & mise en scène: Pierre Notte

****

Théâtre La Bruyère

Tel:  01 48 74 76 99   

 

         photo ©  Lee Fou  

     

De Catherine Deneuve à Gérard Philipe, point de Notte discordant mais bel et bien, de l’une à l’autre, un hommage spirituel à l’humilité au cœur de la notoriété.

D’ailleurs, si l’une aurait pu susciter: « Pour l’amour de Catherine Deneuve », l’autre aurait très bien pu se satisfaire de « Moi aussi, je suis Gérard Philipe ».

Ainsi, à fronts renversés et avec en toile de fond, la même thématique récurrente du handicap tellement humain, l’actrice et le comédien constituent modèle et référence à des destins ordinaires qui posséderaient la vertu de vouloir se sublimer.

Philippe Gérard vice versa, et voici l’artiste qui prend son envol vers la renommée.

Mais pourquoi pas Charles (de Gaulle) l’incarnation de la France, Neil (Armstrong), le premier homme sur la lune, Fidel (Castro) premier ministre à Cuba en 59 ou François (Mitterand) élu président de la République en 81 ?

Une chose est sûre: Alors que la mère, vouant un culte sans partage à l’interprète de Fanfan la tulipe, opterait volontiers pour « Gérard », le père a une nette inclination pour « Charles » le sauveur de la Nation mais, assurément, il préfèrerait savoir son fils, mort en ayant été quelqu’un que vivant en ayant été personne.

Si donc, dans l’air du temps au Théâtre Edouard VII, le « Prénom » prenait des allures concomitantes de choix fatal, voilà qu’au La Bruyère, leur rejeton va naître avec huit doigts en moins que la norme habituelle.

Rien à voir, bien entendu !… Et pourtant le père va se tuer en chutant de la grande roue foraine !….

C’est ainsi que pour Gérard, le grand cirque de la vie va s’ouvrir avec perte et fracas, dans une fuite en avant loin de sa mère, avec le sentiment chevillée d’une responsabilité post mortem confuse.

Porteur d’une ambition parentale écartelée à jamais entre le Grand Charles et Le Cid de Ramatuelle, le fils « prodige » va se révéler, à ses propres yeux, grâce à l’usage de ses deux doigts validés par un couple de saltimbanques, ou plus exactement par Madame Loyal, proche de l’adultère à l’insu du trio de pieds nickelés.

Aussi, comme les mêmes causes produisent des effets identiques, il y a fort à parier que la progéniture annoncée n’ait à son tour que deux doigts à sa disposition…. Ce qui, de toutes évidences, n’empêcherait pas le talent… de l’auteur et du metteur en scène.

En effet, ce spectacle est un véritable régal, un chef d’œuvre d’humour et une merveille d’interprétation.

De surcroît, que le chanteur Raphaël et la comédienne Emma de Caunes y prêtent leur concours pour apporter une tonalité glamour à l’équipe (Bernard Alane, Romain Apelbaum & Sophie Artur,) ô combien expérimentée et tellement pertinente dans le énième degré surréaliste, n’est, non seulement pas, une faute de goût pour le casting mais bel et bien un trait de génie pour la distribution.

Alors, Molières en puissance à tous les étages….

Theothea le 11/03/11

Recherche   par mots-clé

 

 

         

         

 

   

          

   

     

L'étrange affaire Angelica -  mise en scène: Manoel de Oliveira -  Un certain regard/Cannes 2010