Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques    de

  

16ème  Saison     Chroniques   16.081   à   16.085    Page  291

 

   

                                 

         

     

         

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PENSEES SECRETES

de   David  Lodge   

mise en scène:  Christophe Lidon   

****

Théâtre  Montparnasse 

Tel:  01 43 22 77 74 

 

           visuel affiche  

             

Pas si secrètes que cela, les pensées respectives du scientifique et de l’écrivain, mais si profondément intimes que l’homme et la femme vont s’y retrouver dans le secret des consciences en conflit avec elles-mêmes.

En adaptant son propre roman aux modalités de l’espace théâtral anglophone, David Lodge devait transformer le flux narratif en dialectique, tout en révélant peu à peu la personnalité subtile et contradictoire de ses deux interprètes.

La translation en langue française contraignait, par la suite, Gérald Sibleyras à maintenir la spécificité romantique du langage amoureux au-delà de l’argumentation rationaliste.

A son tour, en confiant la scénographie à Catherine Bluwal, Christophe Lidon se donnait l’opportunité d’une mise en scène à la fois abstraite, en même temps que tangible.

En effet, le décor constitué notamment de plusieurs chambranles de portes, le cas échéant, mobiles sur rail, ainsi que d’un verso de canapé et, de manière générale, d’éléments mobiliers conceptuels, servirait de surface projective aux aléas des sentiments autant qu’à celle favorisant l’échange de SMS.

Restait, donc, pour Isabelle Carré et Samuel Labarthe, le soin de transformer le débat intellectuel en idylle extra-conjugale, en s’embarrassant tout autant des pulsions positives que négatives, engageant leurs affects.

Ainsi, la conscience, celle proche de la transmission de pensée affective, voire sexuelle, devrait se confronter avec le principe de réalité, celle de l’époux disparu ainsi que celle de l’épouse trahie mais aussi et surtout celle des neurones en incessante problématique intellectuelle et scientifique.

Au demeurant, l’amour devrait y gagner la reconnaissance de sa phase constructive et bénéfique, en forme de parenthèse plus ou moins grande, au sein de la course évolutive du monde.

Le campus universitaire aurait le mérite de révéler l’immense perspective métaphorique qu’un amant et sa maîtresse ont à leur disposition, dès que la langue des signes subliminaux du sexe traverse le champ de la connaissance.

Theothea le 08/02/12

LE GROS, LA VACHE ET LE MAINATE

       

de & mise en scène:  Pierre Guillois   

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Théâtre du Rond-Point

Tel:   01 44 95 98 21 

 

                photo  ©  David Siebert

                              

S’il existait un Molière du spectacle culte, « Le gros, la vache et le mainate » emporterait, haut la main, le trophée, ainsi labellisé.

Toutefois, comme l’existence des Molières est elle-même, par les temps qui courent, en débat polémique parmi les bien-pensants de la chose culturelle, n’ajoutons pas davantage d’huile sur le feu des passions contrariées.

En revanche, le sous-titre d’ « Opérette barge » va comme un gant à cette dramaturgie vaudevillesque et ne lui sera disputée par personne et, en tout cas, par aucun des spectateurs qui ont eu la chance d’assister à cette débandade savamment orchestrée par l’immense Bernard Menez, depuis sa création en 2010 au Théâtre du Peuple (Bussang - Vosges).

Liés par le pacte du secret qu’il serait iconoclaste de trahir, c’est seulement avec la fougue du ressenti que les témoins de cet objet théâtral unique en son genre, pourraient en développer, de facto, le prosélytisme actif, fût-ce dans l’opportunité d’aficionados.

Au départ, il y a donc, un auteur-acteur-metteur-en-scène, Pierre Guillois, bien décidé à prendre les risques d’une création, assumant le choc des motivations et pulsions contradictoires, mais forcément constitutives du spectacle vivant.

Celles-ci, en messager de la parole à outrance, élaborent la médiation de deux tatas, tante Chose (Pierre Vial) et tante Schmurtz (Jean-Paul Muel) que leur créateur imagine à l’image de « Blues Sisters », version « Cage aux folles », bien convaincues que le délire serait « parole d’évangile » face à la trivialité de la condition humaine désirante autour du rejeton improbable (Olivier Martin-Salvan).

A partir de ces données basiques et structurées, il ne restait plus à l’auteur que d’être cohérent avec lui-même et d’en tirer les conséquences maléfiques à hauteur incantatoire d’un splendide désastre, manière « Zorba le grec ».

Tant que l’effet de surprise jouera à plein sur l’imaginaire du public éberlué, ce spectacle emportera la palme, toutes catégories confondues, de ce qu’il ne faudrait pas faire sur scène, et que précisément pour ces mêmes raisons incorrectes, il était indispensable et urgent de mettre en branle sur les planches de la fantasmagorie triomphante.

Theothea le 13/02/12

MOI JE CROIS PAS !

de   Jean-Claude Grumberg   

mise en scène:   Charles Tordjman   

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Théâtre du Rond-Point

Tel:   01 44 95 98 21 

 

         photo  ©   Giovanni Cittadini        

              

Croyez-vous ou non que Jean-Claude Grumberg ait écrit une pièce de Théâtre ? Selon que vous vous entendrez répondre: « Moi je crois pas ! » ou « Moi je crois », vous ferez, dans les deux cas, la preuve par l’absurde que Catherine Hiegel et Pierre Arditi forment, sur la scène du Rond-Point, le couple lambda universel.

Faisant face à la télévision qui raconte le monde à domicile, lui et elle, en canapé domestique, n’auront d’autres interlocuteurs privilégiés que leur propre image en reflet, faisant écho à l’écran cathodique ou plat, selon la croyance technologique du moment.

Passent alors en revue, les interrogations anecdotiques à parts plus ou moins égales avec les problématiques métaphysiques pour entretenir l’alternative à la pensée du partenaire et, de façon à maintenir en vie le désir d’en découdre avec l’autre face du miroir.

Ainsi, assurant conjointement, deux rôles de composition pour un unique jeu de rôles, l’homme et la femme se donnent la réplique tentant de débusquer le commun dénominateur qui ne saurait les séparer:

« Qu’est-ce qu’il y a à manger ce soir ? », étant admis, par principe, que leur plat vidéo préféré serait « Le documentaire animalier ».

Cependant, si, en réponse à « Moi, je crois pas qu’il y ait une vie après la mort » fuse, par réflexe systématique : « Moi je crois le contraire », mais que, par la suite, en approfondissant cette dialectique, il se révèle que la thèse inverse serait : « Je ne crois pas qu’il y a une vie avant la mort », il devient manifeste que ces deux-là ont du pain sur la planche, ne serait-ce que « Le pain de ménage » !…

Du même tonneau, Jean-Claude Grumberg n’épargne aucune répartie contradictoire à leur entité duelle, trop contente de survivre à l’autarcie de salon, garantissant leur train-train quotidien.

Quelle vie exaltante que de refaire le monde, à peu de frais, en se plaisant à poser la question qui suit la précédente, tout en prenant appui sur la foi du charbonnier et sa dénégation catégorique !

Que passent alors, en amalgame revendiqué, l’abominable Yéti, l’immaculée conception, les fayots péteurs, la taille du zizi, le 11 novembre en confusion avec le 11 septembre et autres sujets qui fâchent… Il n’ y aura désormais plus de limites à la polémique conjugale !

Hiegel-Arditi, un véritable duo classieux au sommet de la communication en vase clos !

Theothea le 12/02/12

DESHABILLEZ MOTS

de  Léonore Chaix & Flor Lurienne   

mise en scène:  Marina Tomé   

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Studio des Champs-Elysées

Tel: 01 53 23 99 19

 

               photo  ©   Theothea.com

   

Dans un studio d’enregistrement, deux journalistes, Flor et Léonore, la brune et la blonde, tout aussi pétulantes l’une que l’autre, ont choisi de convoquer les Mots et de les interviewer. En chair et en os, un à un, les Mots viennent se livrer en se prêtant au jeu d’un strip-texte drolatique.

Le duo nous restitue des saynètes écrites et réalisées par elles-mêmes pour France-inter, ayant remporté le prix de la meilleure œuvre radiophonique 2009 de la Scam.

Les mots incarnés et mis en situation réagissent à leur façon, se rebiffent parfois sur leur définition : « la Légèreté », une coupe de champagne à la main, s’offusque; en effet pour être légère, elle n’en est pas moins profonde car légèreté n’est point synonyme de superficialité.

« La Pusillanimité » n’est pas aimée et elle s’en plaint, sa prononciation est compliquée : la pusillanimi…mité la pusilla… llanimité. Elle est délaissée du langage et voudrait donc récupérer le terrain du vocabulaire.

« L’Amertume » empoisonne les sentiments maltraités; « l’Insouciance » fugue en permanence, chassée par la Gravité; « le Désir » s’échappe dès qu’il est saisi; « le Secret » ne veut pas être confondu avec « le Mystère ».

« La Procrastination », du latin « crastinus », signifiant « du lendemain », est toujours indécise; elle gémit de ne pouvoir trancher et remet sans cesse à demain.

« L’Ennuyant » dans son état temporaire fait la nique à « l’Ennuyeux » qui l’est en permanence.

Quant à « la Virilité », même si le sketch est un peu téléphoné, celle-ci tombe raide en pâmoison à l’évocation de Marlon Brando dans « Un tramway nommé désir ».

Tel un strip-tease, le strip-texte qui nous est livré déshabille progressivement les mots de façon suggestive, comme si les deux femmes les effeuillaient un à un, avec volupté et sensualité, tout en dansant, les dépouillant de leur sens premier, mettant à nu leur réalité.

Ainsi dénudés, il sont réassimilés, en révélant parfois leur sens inavoué.

Les deux croqueuses nous entraînent dans un univers absurde et jubilatoire où le spectateur est amené à s’interroger sur son rapport intime au langage, au Verbe et donc à l’Etre.

Une véritable vitalité poétique se dégage d’une telle exploration. Il faut voir Flor mimer les trois points de suspension ou Léonore sauter dans la peau du point d’exclamation.

A l’heure des SMS, des mots coupés, abrégés et parfois déformés de leur substantifique moelle, quel enchantement de leur prêter vie et de donner l’envie au spectateur de se jeter tout simplement sur un dictionnaire en rentrant chez lui !

Le spectacle est écrit, adapté et interprété par le duo Flor Lurienne et Léonore Chaix, et sa mise en scène, qui mêle radio et théâtre, est signée de Marina Tomé.

Grâce à ces trois femmes, les Mots revendiquent le droit à un véritable respect et le lexique est rehaussé à son plus haut niveau.

Cat.S / Theothea.com, le 24/02/12

HAROLD ET MAUDE

de  Colin Higgins

mise en scène:  Ladislas Chollat   

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Théâtre  Antoine 

Tel: 01 42 08 77 71

 

         visuel affiche  

         

Depuis la sortie cinématographique du scénario de Colin Higgins en 1971 jusqu’à l’adaptation actuelle signée Jean-Claude Carrière, au Théâtre Antoine désormais codirigé par Laurent Ruquier, la fable d’« Harold et Maude » aura engendré, grâce aux plus grandes comédiennes françaises, d’abord la création du rôle par Madeleine Renaud au Récamier en 1973 avant de migrer au Théâtre d’Orsay (75 & 80), d’autre part la reprise de Denise Grey en 1987, déjà au Théâtre Antoine, ainsi que, par la suite, celle de Danielle Darrieux aux Bouffes Parisiens en 1995.

Voici donc aujourd’hui, l’autre sublime « Renaud », notre incomparable « Line » Nationale, ayant attendu patiemment d’avoir l’âge du rôle pour pouvoir, enfin à son tour, incarner, à 80 années pétantes, cette muse transgénérationnelle, plus que jamais bon pied bon œil, prête à escalader l’arbre des bonnes convenances en faisant joyeusement la nique aux gendarmes tout en s’affranchissant des huissiers et de tous les bien pensants de la normalité.

A ses côtés et en pleine connivence, un jeune prodige, Thomas Soliverès, révélé par le film « Les Intouchables », prend une maligne satisfaction à se pendre à toutes les variantes spectaculaires de suicides dédiés, à dessein, à tous ceux qui s’ y laisseraient prendre et parmi lesquels s’inscrit chacune des jeunes filles que sa mère aurait décidé de lui faire rencontrer pour nouer l’improbable idylle de la maturité.

Claire Nadeau, en charge d’interpréter cette génitrice égocentrique et aveugle à la souffrance affective de son fils en manque, dès la petite enfance, de reconnaissance maternelle, compose, en contrepoint de la complicité grandissante entre Maude et son rejeton, un personnage déphasé juste à souhait pour les planches.

C’est ainsi, de surcroît, qu’aucun des rôles n’apparaît secondaire car tous concourent à déjanter le canevas relationnel, tentant en vain de rendre scabreux « l’amour » naissant, à 60 années d’intervalle, entre Maude et Harold.

Décor sur tournettes, scénographie décalée et effets particulièrement spéciaux contribuent à rendre le jeu des huit acteurs, entourant Line Renaud, fort réjouissant dans leur étrangeté fantasque, pendant que l’artiste prend un plaisir, non dissimulé, à vanter, par delà la rampe, un « carpe diem » sans réserve, à l’égard du public totalement réjoui de pouvoir, ainsi, apprécier au mieux la légende.

Theothea le 20/02/12

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