Magazine du Spectacle vivant ...

   

 

   

Les    Chroniques   de

  

17ème  Saison     Chroniques   17.051   à   17.055    Page  312

 

                                          

   

              

     

   

     

              

   

            

     

65ème Festival de Cannes 2012

sous ondée crépusculaire

   

Les Molières 2013

en perspective

   

R E V I V A L

Wight ! + 40 années après

     

Toutes nos  critiques   2012 - 2013

Les Chroniques de   Theothea.com   sur    

   

THEA BLOGS                    Recherche   par mots-clé                    THEA BLOGS          

FAHRENHEIT 451

de  Ray Bradbury   

mise en scène  David Géry   

****

Théâtre de la Commune

Tel: 01 48 33 16 16

   

          photo ©   Philippe Delacroix

                       

451 degrés Fahrenheit, le moment précis où le papier s’enflamme au simple contact de l’air chaud! Pas besoin de censure ! L’autodafé s’embrase de lui-même selon des règles thermiques impartiales.

Et pourtant si le doute s’insinuait, ne serait-ce que chez un seul des pompiers de la brigade d’intervention spécialisée en déstockage culturel massif, peut-être que la contagion destructrice devrait inverser ses prérogatives !

Une amie de passage, Clarisse (Lucrèce Carmignac), qui vous donnerait le goût du fruit défendu pourrait bien valoir une épouse, Mildred (Clara Ponsot), qui vous trahirait, au point de devoir se réfugier incognito au sein d’une communauté humaine qui aurait le projet ambitieux de sauver la littérature de la menace de l’oubli, en apprenant par cœur le contenu des livres.

       

     

          photo ©   Theothea.com  

                   

Ainsi, en flirtant avec les stigmates du décervelage collectif moderne, les effets spéciaux pyrotechniques de Jeff Yelnik se substitueraient en catalyseur d’une prise de conscience que la résistance sourde de l’antihéros Montag (Quentin Baillot) illustrerait comme la parabole d’une marche inexorable vers la liberté chorale !

Sur la scène du Théâtre de la Commune, une dizaine d’hommes et de femmes accompagne les sept comédiens, au final de chaque représentation, pour célébrer ces instants magiques où leurs voix deviennent les passeurs d’une parole plurielle enfin retrouvée.

En hommage à François Truffaut, la scénographie de Jean Haas fait écho aux techniques cinématographiques pour célébrer ce grand classique de l’anticipation que Ray Bradbury, en 1953, avait projeté dans un futur lambda et dont la réalisation de David Géry suggère les clefs d’une perspective contemporaine.

Theothea le 22/01/13

LE CERCLE DE CRAIE CAUCASIEN

de  Bertolt Brecht   

mise en scène  Fabian Chappuis   

****

Théâtre 13 Seine

Tel  01 45 88 62 22

   

           photo ©   Bastien Capela                

     

Osons espérer que la Compagnie du Lierre créée en 1974 par Farid Paya qui, historiquement, a été la bâtisseuse d’un lieu théâtral de grande qualité, saura retrouver ses marques, après avoir été écartée de la direction du nouveau Théâtre 13 côté Seine… toujours flambant neuf, un an et demi depuis qu’effectivement l’initial Théâtre 13, dit maintenant côté jardin, a pris les rênes de ce centre de création et de diffusion du spectacle vivant, désormais bipolaire, sous la direction effective de Colette Nucci…

La découverte de cette seconde salle, à l’occasion de la création du Cercle de craie caucasien, est en soi l’illustration d’un jugement de Salomon totalement assumé en forme de synthèse constructive :

En effet, si le magnifique « Rostam et Sohrâb » de Farid Paya est actuellement nomade, une série de représentations en mai-juin 2012 lui a permis de retrouver le phénix de ces lieux originels et dans un second cycle, d’émigrer au Théâtre de l’Epée de bois à la Cartoucherie.

         

     

           photo ©   Theothea.com  

                 

Mais place donc, en ce début janvier 2013, à cette mise en scène très enthousiasmante de Fabian Chappuis dont la scénographie s’appuie sur deux plans inclinés mobiles pour suggérer un imaginaire brechtien à la libre disponibilité de tout un chacun.

Il faut dire que l’interprétation des comédiens est époustouflante d’intensité dramatique, de force chorale, de rigueur et de fantaisie chorégraphique.

Selon le cercle de craie tracé à même le sol sous l’initiative de l’imprévisible Azdak, c’est bien la destinée d’un enfant tourneboulé dans un monde d’adultes en guerre permanente qui devra être tranché dans un souci d’équité entre l’œuvre de filiation et celle d’éducation, quelque part entre Nature et Amour !…

A la fois digne et fantasque, cette fable emporte l’adhésion collective à l’égard de cet objectif périlleux, d’autant plus que la compagnie Otten en fait émerger une cinquantaine de personnages grâce à une dizaine de comédiens complètement investis dans l’expression du texte oral incarné dans le corps physique.

Au centre du dispositif, la marionnette de l’enfant grandissante au fur et à mesure, sera manipulée à vue, en s’intégrant par magie au jeu de l’ensemble de la troupe sur scène. Costumes, coiffes, lumières, musique, tout est à l’unisson pour emmener le spectateur au pays du rêve éveillé.

Dehors il neige; à l’intérieur, il fait chaud; oui, ce soir, c’est la première d’un spectacle totalement abouti, signé Fabian Chappuis, dans ce magnifique théâtre 13 côté Seine !

Theothea le 21/01/13   

CALME

de  Lars Norén   

mise en scène   Jean-Louis Martinelli   

****

Théâtre des Amandiers

Tel   01 46 14 70 00   

 

           photo ©   Theothea.com  

           

« Calme » pourrait être à la « Cerisaie » ce que la décomposition de la famille mononucléaire serait à celle de la famille généalogique !

Si pour Lars Norén comme pour Tchekhov, la cause initiale de cette détérioration sociale est initialement économique, chez les deux écrivains la sphère psychologique l’emporte rapidement sur tout autre considération.

Lars Norén a choisi le quatuor comme mesure de référence car telle est la norme autobiographique qui a conditionné toute sa jeunesse.

C’est en parallèle d’une cure psychanalytique que le dramaturge eut l’opportunité d’écrire « Calme », troisième volet d’une trilogie où cette phase ultime faisait office de synthèse à la saga universelle unissant, a priori pour le meilleur mais souvent pour le pire, les liens du sang en une destinée commune cédant aisément aux sirènes de la pathologie familiale.

Ici sont donc réunis, en ce grand hôtel déserté par les clients, le père, la mère et leurs deux fils majeurs en compagnie d’une employée en charge de la maintenance générale.

Vivant les uns avec les autres, les uns sur les autres, les uns contre les autres, c’est bel et bien le royaume du handicap, apparaissant dans toute sa splendeur par couches successives, qui va être révélé durant trois heures à des spectateurs, pris à témoins d’un déphasage collectif chronique.

C’est sur fond d’alcoolisme du père que va se développer la maladie irréversible de la mère mais c’est surtout sur l’incapacité des enfants à concevoir l’autonomie vitale que le débordement affectif va se répandre en son contraire venimeux contaminant, peu à peu, tous les rouages dynamiques identitaires.

Jean-Pierre Darroussin et Christiane Millet auront beau avoir le souci de maintenir les apparences d’une famille « normale », John et Ingemar n’auront de cesse de faire déraper le concept cellulaire idéale, alors même qu’ils s’y accrochent désespérément, telle la moule à son rocher.

L’un en surprotégeant la mère, l’autre en la défiant, tous les deux en affichant un mépris condescendant face au père, leurs interprètes Alban Guyon et Nicolas Pirson jouent en permanence le va-tout du malaise psychosocial, reflet d’une déviance sociétale dont l’étrangeté se développe en abîme infini.

Une grande mélancolie se dégage de cette mise en scène de Jean-Pierre Martinelli, au point de faire sombrer tous les systèmes de défense immunisant le corps social et d’en désagréger le noyau nucléaire.

Theothea le 24/01/13

EN ATTENDANT GODOT

de  Samuel Beckett   

mise en scène   Bernard Levy   

****

Théâtre  de L'Athénée 

Tel  01 53 05 19 19

 

            photo ©   Theothea.com  

                   

Revoici à l’Athénée la fine équipe que Bernard Levy y avait déjà réuni en 2009 autour de Godot.

Précédant la reprise à l’identique de « Fin de partie » déjà montée en 2006, ce diptyque a tout pour séduire l’amateur de Beckett.

En duo de choc de la première phase, Gilles Arbona et Thierry Bosc portent le célèbre dialogue autour de l’attente infinie au plus près d’une compréhension métaphysique sans cesse repoussée au lendemain, à moins que le jour suivant soit l’occasion rêvé pour se pendre et pourvu que la corde ainsi que la branche soient suffisament solides ! Ce qui, de toutes évidences, n’est pas gagné d’avance !

Patrick Zimmermann dans le rôle de Pozzo vient allègrement leur apporter une contradiction tenace, avec le verbe haut et comminatoire qui sied à celui qui ne doute pas de la marche forcée en avant puisque… inéluctable !

Tous continueront leur bonhomme de chemin, car, en définitive, c’est ce qu’il y a de mieux à faire, après avoir pu apprécier ces excellents comédiens dans leur brillante œuvre de représentations récurrentes.

Theothea le 26/01/13

D.A.F. MARQUIS DE SADE

de  Pierre-Alain Leleu   

mise en scène  Nicolas Briançon   

****

Ciné 13 Théâtre  

Tel  01 42 54 15 12

     

           photo ©  Lot  

                

Donatien Alphonse François, trente années d’emprisonnement sur soixante quinze de survie au long des XVIIème & XVIIIème siècles !

C’est durant son séjour carcéral partagé entre Vincennes et Bastille, que l’écrivain se forgera la liberté de tout dire et même plus.

Par la suite, en laissant publier « Justine », il retrouvera le chemin de la réclusion qui, sans passer par la case réhabilitation, l’emmènera définitivement à l’asile de Charenton.

Pierre-Alain Leleu se fait un malin plaisir d’incarner le divin Marquis jusqu’aux extrémités des provocations flagrantes, voire des transgressions destinées à proscrire tout penchant défensif à l’autocensure.

En tant que dramaturge, il donne la parole à D.A.F. pour que rien des apparentes outrances ne soit omis et de telle façon que le dossier Sade ne soit suspect d’aucune complaisance, fût-ce même avec la littérature !

Quant à Nicolas Briançon, enclin à illustrer sa direction d’acteurs par la maxime voltairienne : «Je ne partage pas vos idées mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous puissiez les exprimer», sa mise en scène permet au Marquis de s’adresser, par-delà ses lecteurs, aux éventuels détracteurs afin que ceux-ci aient la sagesse de comprendre que:

« Si nous n’avions pas tout dit, tout analysé, comment voudrais-tu que nous eussions pu deviner ce qui te convient ? C’est à toi à le prendre et à laisser le reste, sans déclamer contre ce reste, uniquement parce qu’il n’a pas le talent de te plaire. Songe qu’il plaira à d’autres, et sois philosophe. …. » .

       

       

                       photo ©   Theothea.com  

                       

Au Ciné 13 Théâtre, trois rôles se relaient auprès de Sade sous forme d’un maton, d’une religieuse et d’une femme « fantasme » pour permettre à l’écrivain d’accoucher des tourments relevant de l’universel.

Psychanalyse violente s’il en fut dans les mots, c’est donc à Dany Verrissimo qu’incombe cette tâche d’être l’objet du transfert sur lequel vient littéralement se projeter le Marquis.

Savoureux travail de comédienne, celui-ci mérite d’être honoré au moins autant que celui de Pierre-Alain Leleu, lui-même.

Theothea le 26/01/13    

Recherche   par mots-clé