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FAHRENHEIT 451
de
Ray Bradbury
mise en scène
David Géry
|
****
Théâtre de la Commune
Tel:
01 48 33 16 16
|
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photo © Philippe
Delacroix
|
451 degrés Fahrenheit, le moment précis où le papier
senflamme au simple contact de lair chaud! Pas besoin de censure
! Lautodafé sembrase de lui-même selon des règles
thermiques impartiales.
Et pourtant si le doute sinsinuait, ne serait-ce que chez un seul
des pompiers de la brigade dintervention spécialisée
en déstockage culturel massif, peut-être que la contagion
destructrice devrait inverser ses prérogatives !
Une amie de passage, Clarisse (Lucrèce Carmignac), qui vous donnerait
le goût du fruit défendu pourrait bien valoir une épouse,
Mildred (Clara Ponsot), qui vous trahirait, au point de devoir se réfugier
incognito au sein dune communauté humaine qui aurait le projet
ambitieux de sauver la littérature de la menace de loubli, en
apprenant par cur le contenu des livres.
Ainsi, en flirtant avec les stigmates du décervelage collectif
moderne, les effets spéciaux pyrotechniques de Jeff Yelnik se
substitueraient en catalyseur dune prise de conscience que la
résistance sourde de lantihéros Montag (Quentin Baillot)
illustrerait comme la parabole dune marche inexorable vers la liberté
chorale !
Sur la scène du Théâtre de la Commune, une dizaine
dhommes et de femmes accompagne les sept comédiens, au final
de chaque représentation, pour célébrer ces instants
magiques où leurs voix deviennent les passeurs dune parole plurielle
enfin retrouvée.
En hommage à François Truffaut, la scénographie de
Jean Haas fait écho aux techniques cinématographiques pour
célébrer ce grand classique de lanticipation que Ray
Bradbury, en 1953, avait projeté dans un futur lambda et dont la
réalisation de David Géry suggère les clefs dune
perspective contemporaine.
Theothea le 22/01/13
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LE CERCLE DE CRAIE
CAUCASIEN
de
Bertolt Brecht
mise en scène
Fabian Chappuis
|
****
Théâtre 13 Seine
Tel 01 45 88 62 22
|
Osons espérer que la Compagnie du Lierre créée en
1974 par Farid Paya qui, historiquement, a été la bâtisseuse
dun lieu théâtral de grande qualité, saura retrouver
ses marques, après avoir été écartée de
la direction du nouveau Théâtre 13 côté Seine
toujours flambant neuf, un an et demi depuis queffectivement
linitial Théâtre 13, dit maintenant côté
jardin, a pris les rênes de ce centre de création et de diffusion
du spectacle vivant, désormais bipolaire, sous la direction effective
de Colette Nucci
La découverte de cette seconde salle, à loccasion
de la création du Cercle de craie caucasien, est en soi
lillustration dun jugement de Salomon totalement assumé
en forme de synthèse constructive :
En effet, si le magnifique « Rostam et Sohrâb »
de Farid Paya est actuellement nomade, une série de représentations
en mai-juin 2012 lui a permis de retrouver le phénix de ces lieux
originels et dans un second cycle, démigrer au Théâtre
de lEpée de bois à la Cartoucherie.
Mais place donc, en ce début janvier 2013, à cette mise
en scène très enthousiasmante de Fabian Chappuis dont la
scénographie sappuie sur deux plans inclinés mobiles
pour suggérer un imaginaire brechtien à la libre
disponibilité de tout un chacun.
Il faut dire que linterprétation des comédiens est
époustouflante dintensité dramatique, de force chorale,
de rigueur et de fantaisie chorégraphique.
Selon le cercle de craie tracé à même le sol sous
linitiative de limprévisible Azdak, cest bien la
destinée dun enfant tourneboulé dans un monde dadultes
en guerre permanente qui devra être tranché dans un souci
déquité entre luvre de filiation et celle
déducation, quelque part entre Nature et Amour !
A la fois digne et fantasque, cette fable emporte ladhésion
collective à légard de cet objectif périlleux,
dautant plus que la compagnie Otten en fait émerger une cinquantaine
de personnages grâce à une dizaine de comédiens
complètement investis dans lexpression du texte oral incarné
dans le corps physique.
Au centre du dispositif, la marionnette de lenfant grandissante
au fur et à mesure, sera manipulée à vue, en
sintégrant par magie au jeu de lensemble de la troupe
sur scène. Costumes, coiffes, lumières, musique, tout
est à lunisson pour emmener le spectateur au pays du rêve
éveillé.
Dehors il neige; à lintérieur, il fait chaud; oui,
ce soir, cest la première dun spectacle totalement abouti,
signé Fabian Chappuis, dans ce magnifique théâtre 13
côté Seine !
Theothea le 21/01/13
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CALME
de
Lars Norén
mise en scène
Jean-Louis Martinelli
|
****
Théâtre des Amandiers
Tel 01 46 14 70
00
|
« Calme » pourrait être à la
« Cerisaie » ce que la décomposition de la famille
mononucléaire serait à celle de la famille généalogique
!
Si pour Lars Norén comme pour Tchekhov, la cause initiale de cette
détérioration sociale est initialement économique, chez
les deux écrivains la sphère psychologique lemporte
rapidement sur tout autre considération.
Lars Norén a choisi le quatuor comme mesure de référence
car telle est la norme autobiographique qui a conditionné toute sa
jeunesse.
Cest en parallèle dune cure psychanalytique que le
dramaturge eut lopportunité décrire
« Calme », troisième volet dune trilogie
où cette phase ultime faisait office de synthèse à la
saga universelle unissant, a priori pour le meilleur mais souvent pour le
pire, les liens du sang en une destinée commune cédant
aisément aux sirènes de la pathologie familiale.
Ici sont donc réunis, en ce grand hôtel déserté
par les clients, le père, la mère et leurs deux fils majeurs
en compagnie dune employée en charge de la maintenance
générale.
Vivant les uns avec les autres, les uns sur les autres, les uns contre
les autres, cest bel et bien le royaume du handicap, apparaissant dans
toute sa splendeur par couches successives, qui va être
révélé durant trois heures à des spectateurs,
pris à témoins dun déphasage collectif
chronique.
Cest sur fond dalcoolisme du père que va se
développer la maladie irréversible de la mère mais
cest surtout sur lincapacité des enfants à concevoir
lautonomie vitale que le débordement affectif va se répandre
en son contraire venimeux contaminant, peu à peu, tous les rouages
dynamiques identitaires.
Jean-Pierre Darroussin et Christiane Millet auront beau avoir le souci
de maintenir les apparences dune famille
« normale », John et Ingemar nauront de cesse de
faire déraper le concept cellulaire idéale, alors même
quils sy accrochent désespérément, telle
la moule à son rocher.
Lun en surprotégeant la mère, lautre en la
défiant, tous les deux en affichant un mépris condescendant
face au père, leurs interprètes Alban Guyon et Nicolas Pirson
jouent en permanence le va-tout du malaise psychosocial, reflet dune
déviance sociétale dont létrangeté se
développe en abîme infini.
Une grande mélancolie se dégage de cette mise en scène
de Jean-Pierre Martinelli, au point de faire sombrer tous les systèmes
de défense immunisant le corps social et den désagréger
le noyau nucléaire.
Theothea le 24/01/13
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EN ATTENDANT GODOT
de
Samuel Beckett
mise en scène
Bernard Levy
|
****
Théâtre de
L'Athénée
Tel 01 53 05 19 19
|
Revoici à lAthénée la fine équipe que
Bernard Levy y avait déjà réuni en 2009 autour de
Godot.
Précédant la reprise à lidentique de
« Fin de
partie » déjà montée en 2006, ce diptyque
a tout pour séduire lamateur de Beckett.
En duo de choc de la première phase, Gilles Arbona et Thierry Bosc
portent le célèbre dialogue autour de lattente infinie
au plus près dune compréhension métaphysique sans
cesse repoussée au lendemain, à moins que le jour suivant soit
loccasion rêvé pour se pendre et pourvu que la corde ainsi
que la branche soient suffisament solides ! Ce qui, de toutes évidences,
nest pas gagné davance !
Patrick Zimmermann dans le rôle de Pozzo vient allègrement
leur apporter une contradiction tenace, avec le verbe haut et comminatoire
qui sied à celui qui ne doute pas de la marche forcée en avant
puisque
inéluctable !
Tous continueront leur bonhomme de chemin, car, en définitive,
cest ce quil y a de mieux à faire, après avoir
pu apprécier ces excellents comédiens dans leur brillante
uvre de représentations récurrentes.
Theothea le 26/01/13
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D.A.F. MARQUIS DE
SADE
de
Pierre-Alain Leleu
mise en scène
Nicolas Briançon
|
****
Ciné 13 Théâtre
Tel 01 42 54 15 12
|
Donatien Alphonse François, trente années demprisonnement
sur soixante quinze de survie au long des XVIIème &
XVIIIème siècles !
Cest durant son séjour carcéral partagé entre
Vincennes et Bastille, que lécrivain se forgera la liberté
de tout dire et même plus.
Par la suite, en laissant publier « Justine », il
retrouvera le chemin de la réclusion qui, sans passer par la case
réhabilitation, lemmènera définitivement à
lasile de Charenton.
Pierre-Alain Leleu se fait un malin plaisir dincarner le divin Marquis
jusquaux extrémités des provocations flagrantes, voire
des transgressions destinées à proscrire tout penchant
défensif à lautocensure.
En tant que dramaturge, il donne la parole à D.A.F. pour que rien
des apparentes outrances ne soit omis et de telle façon que le dossier
Sade ne soit suspect daucune complaisance, fût-ce même
avec la littérature !
Quant à Nicolas Briançon, enclin à illustrer sa direction
dacteurs par la maxime voltairienne : «Je ne partage pas vos
idées mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous puissiez
les exprimer», sa mise en scène permet au Marquis de
sadresser, par-delà ses lecteurs, aux éventuels
détracteurs afin que ceux-ci aient la sagesse de comprendre que:
« Si nous navions pas tout dit, tout analysé, comment
voudrais-tu que nous eussions pu deviner ce qui te convient ? Cest
à toi à le prendre et à laisser le reste, sans
déclamer contre ce reste, uniquement parce quil na pas
le talent de te plaire. Songe quil plaira à dautres, et
sois philosophe.
. » .
Au Ciné 13 Théâtre, trois rôles se relaient
auprès de Sade sous forme dun maton, dune religieuse et
dune femme « fantasme » pour permettre à
lécrivain daccoucher des tourments relevant de
luniversel.
Psychanalyse violente sil en fut dans les mots, cest donc
à Dany Verrissimo quincombe cette tâche dêtre
lobjet du transfert sur lequel vient littéralement se projeter
le Marquis.
Savoureux travail de comédienne, celui-ci mérite
dêtre honoré au moins autant que celui de Pierre-Alain
Leleu, lui-même.
Theothea le 26/01/13
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