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Les    Chroniques   de

  

23ème  Saison     Chroniques   23.11   à   23.15    Page  435

 

     

          

             

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LA MACHINE DE TURING

de  Benoît Solès 

mise en scène   Tristan Petitgerard 

avec  Benoît Solès & Amlaury de Crayencour 

****

     

Théâtre  Michel

   

© Fabienne Rappeneau

           

La Machine de Turing de et avec Benoît Solès réside au Théâtre Michel après avoir fait le buzz du festival off d'Avignon l'été dernier. Révélé dans deux spectacles musicaux de Roger Louret primés aux Molières ("La Java des Mémoires" et "Les Années Twist"), Benoît Solès est un homme de Théâtre polyvalent, à la fois comédien et auteur.

Il a joué, entre autres, dans "Bash" avec Sarah Biasini, le "Cyrano de Bergerac" mis en scène par Henri Lazarini, "les Amoureux" de Goldoni ou plus récemment dans "Rupture à Domicile" de Tristan Petitgirard qui signe également la mise en scène de "La Machine de Turing".

En tant qu'auteur, il a écrit "Appelez-moi Tennesse" en 2011, mis en scène par Gilbert Pascal et, actuellement, sa nouvelle pièce lui permet de réhabiliter un homme méconnu du grand public et pourtant hors du commun, injustement resté dans l'ombre.

Celle-ci débute, dans l'hiver 1952, à Manchester, par un fait divers, le dépôt de plainte au commissariat pour un cambriolage du domicile d'un personnage visiblement atypique et tourmenté.

Les conséquences de cet acte anodin seront dramatiques car les autorités menant l'enquête vont être amenées à découvrir l'homosexualité de la victime à cause de sa relation jugée douteuse avec un garçon de café peu scrupuleux, et qu'en Angleterre, dans ces sombres années de Guerre Froide particulièrement prudes et bien pensantes, cette pratique sexuelle est considérée comme un délit ou une maladie mentale.

Il va tomber, comme Oscar Wilde soixante ans plus tôt, sous le coup de la loi de 1885. La justice lui laisse alors le choix entre la prison et la castration chimique. Il choisit la seconde alternative pour continuer ses recherches.

Car cet homme n'est pas moins qu'Alan Turing, professeur d'université et mathématicien cryptologue, mettant en place des codes réalisés à partir d'algorithmes complexes.

La pièce va remonter le temps : On se retrouve au début des années 40 ; Alan Turing est chargé par le gouvernement Britannique de percer le secret de la célèbre machine de cryptage allemande Enigma, réputée inviolable.

La bataille mathématique engagée par Turing est alors la source d’un suspense aussi insoutenable que celui d’une grande scène de guerre. Il travaille sans relâche au sein des équipes réunies à Bletchley Park.

Il réussira à casser le système de codage allemand. La Royal Navy, qui était en train de perdre la bataille de l’Atlantique contre les sous-marins nazis put ainsi redresser la situation en ayant connaissance des messages les plus dissimulés de son adversaire.

La mise en scène judicieuse et nerveuse de Tristan Petitgirard nous fait ainsi passer de la recherche de ce code secret à la découverte d’un homme, lui-même très réservé. A travers le portrait de ce génie asocial, capable de dialoguer avec les mécanismes les plus complexes, mais pas du tout fait pour les relations humaines, une hypothèse forte s’affirme : L’homme qui vainquit une machine en serait-il une lui-même !

On jonglera par flash-back, jouant avec les années, pour suivre le parcours de cet homme dont la mission classée secret défense est soutenue sur scène par un rythme dynamique empruntant les règles du thriller psychologique, sur fond d'écran toujours animé projetant des images d'archives ou celles de la fameuse "machine", embryon du "cerveau artificiel", véritable ancêtre de l'ordinateur dont les perpétuels rouages résonnent dans la salle (création vidéo Mathias Delfau).

Quant à Alan Turing, Benoît Solès l'interprète en en faisant tantôt un être complexé, maladroit, bourré de tics et bègue, tantôt un être malicieux, voire cynique, aux fulgurances intellectuelles indéniables. Le comédien parvient à exprimer l’efficience presque robotisée de Turing mais aussi sa solitude, sa souffrance, son décalage. Face à lui, son complice Amaury de Crayencour revêt brillamment tous les autres costumes, du sergent Ross, au joueur d'échecs Alexander ou celui de l'amant Arnold.

Ce chercheur insatiable qui réalisait des temps remarquables au marathon ne supportera pas la déchéance physique infligée par la castration. Comme dans Blanche-Neige qu’il avait découvert au cinéma dans son enfance et qui l’avait fasciné, il s’empoisonne, à 41 ans, avec une pomme enduite de cyanure, le 7 juin 1954. Dans la culture populaire, on fait du logo de la firme Apple un hommage à ce pionnier de l'informatique au destin tragique.

En 2009, le Premier ministre Gordon Brown présenta des excuses au nom du gouvernement britannique pour la manière dont Alan Turing fut traité. En 2013, la Reine Elizabeth lui exprima un pardon posthume.

Avec sa pièce pleine de finesse et de subtilité, Benoît Solès a remis sur le devant de la scène ce personnage de génie, torturé, héros de guerre inconnu et, en quelque sorte, découvreur du monde numérique.

Cat’s / Theothea.com le 26/10/18

   

                  

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HARD

de  Cathy Verney 

mise en scène  Nicolas Briançon

avec  Clkaire Borotra, Charlie Dupont, François Vincentelli, Isabelle Vitari, Nicole Croisille & Stephan Wojtowicz 

****

     

Théâtre de La Renaissance

   

© Theothea.com

                                                 

Quand Nicolas Briançon s’empare d’un sujet, son intention n’est guère d’en extraire une potion mièvre et donc avec « Hard », difficile d’imaginer que le ton puisse échapper au « rentre dedans ».

Mais comme tout est « dans la manière », c’est ici sur le ton de la farce énorme que le réalisateur renvoie tous les tabous, cul par-dessus tête.

Reprenant une série française ayant cartonné sur Canal +, en conservant la plupart des acteurs y ayant officié tout en les encadrant, dans cette adaptation théâtrale, de pointures telles que Claire Borotra, Nicole Croisille ou Stephan Wojtowicz, le metteur en scène prend un malin plaisir à rendre dérisoire l’industrie cinématographique du sexe, fût-elle en la circonstance complètement artisanale.

En tordant à souhait le schéma classique prévalant habituellement au cœur de l’action cristallisant le porno dans ses poncifs lourdingues, Bruno Gaccio imagine tout d’abord un héritage permettant à une veuve de découvrir la véritable activité professionnelle de feu son mari qui, ainsi, dirigeait un studio X et qui, en quelque sorte, lui lègue ce cadeau empoisonné.

Mais de plus l’adaptateur pousse le bouchon encore plus loin, en suscitant un véritable coup de foudre entre cette veuve bon chic bon genre et l’acteur emblématique de ce business à gros revenus…

Bref, tous les ingrédients retournant les codes d’un monde interlope sont mis en exergue, de telle façon à rendre surréaliste la poursuite d’une activité opaque que tous, néanmoins, veulent préserver comme s’il s’agissait de la poule aux œufs d’or.

Jonglant en déséquilibre permanent sur le malentendu scabreux originel qui, de fait, donnerait naissance au grand Amour, les comédiens se relaient devant le public ébaubi pour alimenter et faire progresser cette comédie « drôlement jouissive ».

A ce petit jeu, Stephan Wojtowicz mène le bal du blasé revenu de toutes les galères avec son acolyte Charlie Dupont toujours en retard dans la compréhension des enjeux; le point de vue féminin se répartit allègrement la composition des postures entre hypocrisie et sidération feinte autour de l’apollon de fortune, François Vincentelli.

Tout ce joyeux monde fait tourner le manège du plaisir avec une maestria à rendre caduque toutes les censures. La Renaissance est en marche lubrique !

Theothea le 24/10/18

               

   

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KING KONG THEORIE

de  Virginie Despentes 

mise en scène  Vanessa Larré  

avec  Anne Azoulay, Marie Denarnaud & Valérie de Dietrich 

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Théâtre de l'Atelier

   

© Stanley Woodward

                                     

Après avoir assisté au Théâtre de l’Atelier, en octobre 2018, à l’une des représentations du manifeste féministe de Virginie Despentes paru en 2006 avec, en l’occurrence, un déficit sonore de compréhension des voix, il apparaît clairement, sur la captation vidéo visionnée en janvier 2019, qu’une fois pour toutes les trois protagonistes sont bien différenciées en une seule entité scénographique pertinente et judicieusement adaptée au message idéologique résolument optimiste revendiqué par l’autrice.

En effet, nonobstant la nature humaine faisant du genre masculin le tourmenteur de la gente féminine qui, elle, serait destinée par un étrange atavisme culturel à accepter son sort de soumission dédiée, Virginie Despentes veut croire à une révolution des mœurs à venir faisant de l’homme et de la femme des partenaires à « armes » égales.

Cela dit, le tableau dressé douze ans plus tôt n’est pas spécialement flatteur quant à l’harmonie des relations sexuelles observées par le filtre sociétal délibérément incorrect adopté par l’écrivaine.

Se disant rebelle aux convenances acquises composant les normes attendues d’un modèle féminin standard, celle-ci revendique un statut à l’égal du masculin permettant d’accéder à l’autonomie, au choix, au plaisir, bref à la liberté d’exister comme un être cohérent et désirant.

Paradoxalement, l’épreuve du viol subi à la sortie de l’adolescence va induire une volonté farouche de persister dans l’affrontement direct en refusant au quotidien les codes de bienséance formatée, en prônant systématiquement l’onanisme et en expérimentant la prostitution volontaire autant que la pornographie pleinement assumée.

Aussi, remettant en question l’arsenal structurant la société, la féminité y est présentée comme un leurre défensif à la soumission universelle exaltée par l’éducation sociale et l’institution du mariage comme le symbole de l’asservissement suprême.

Faisant de King Kong une métaphore d’avant la distinction des genres dont la séduction érotique en serait peu à peu devenue la garante, voici que s’esquissera, en réaction, la perspective conceptuellement idéale d’un monde où le masculin et le féminin se projetteraient définitivement en sujets existentiels à part entière.

En attendant donc que l’homme se réveille de sa torpeur l’incitant à l’entre-soi mâle se servant de la femme comme d’une interface accessoire et conjoncturelle, Virginie Despentes s’attribue les prérogatives de l’adversaire en retournant le gant à la manière d’une performeuse totalement convaincue à terme de la victoire finale.

Theothea le 26/01/19

         

                 

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QUI A PEUR DE VIRGINIA WOOLF ?

d' Edward Albee

mise en scène  Panchika Velez     

avec  Aurélien Chaussade, Stéphane Fiévet, Frédérique Lazarini & Agnès Miguras  

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Théâtre 14

   

© Theothea.com

   

Cette nouvelle création de « Qui a peur de Virginia Woolf ? » au Théâtre 14 fut une véritable réussite tant la production, la mise en scène et bien entendu l’interprétation étaient, de toute évidence, impliquées en osmose avec cet exorcisme relationnel, chef d’œuvre d’Edward Albee.

Ce sont les comédiens Frédérique Lazarini et Stéphane Fiévet, eux-mêmes, qui avaient fait part à la metteuse en scène Panchika Velez de leur souhait de jouer ces rôles si mobilisateurs d’énergie concernant le couple George & Martha.

De cette envie initiale est donc sortie, durant un mois et demi au Théâtre 14, cette fascinante descente au tréfonds de l’âme humaine en proie à des tourments intimes déniés jusqu’à l’impossible retour à toute paix initiale, même simulée, à moins que le paradoxal jeu du paroxysme puisse contenir en puissance les vertus de l’apaisement…

Cette remarquable réalisation mériterait largement sa résidence prolongée dans un théâtre privé parisien ayant l’intuition du succès absolu.

Theothea le 18/01/19

         

                

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POURVU QU'IL SOIT HEUREUX

« Pourvu qu’il soit heureux » Francis Huster & Fanny Cottençon : coming out boomerang

     

de  Laurent Ruquier 

mise en scène  Steve Suissa  

avec  Francis Huster, Fanny Cottençon & Louis Le Barazer 

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Théâtre  Antoine

   

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Alors que Laurent Ruquier se désengage de la direction du Théâtre Antoine qu’il partageait depuis plusieurs années avec Jean-Marc Dumontet, l’animateur des Médias fait les beaux jours de cette première partie de saison 18-19 dans cette même salle illustre.

Jauge pleine d’un public tendance retraite aisée, son nouvel opus en forme de « coming out » à contre-pied fait un tabac grâce à un casting construit sur mesure.

Tout d’abord, deux valeurs sûres s’y partagent autant le haut de l’affiche que les rôles puisque sa pièce structurée en trois parties commence par inverser les points de vue de la mère et du père en deux temps successifs.

En effet, dans la première option, Maxime (Francis Huster) est outré d’apprendre que son fils est en couple homosexuel alors que Claudine (Fanny Cottençon), elle, est plutôt amusée et flattée de découvrir que Camille est en couverture d’un magazine people.

Par la suite selon l’hypothèse alternative, la complaisance change de camp alors que le paternel se montre beaucoup plus compréhensif vis-à-vis du rejeton que de son épouse à qui il reproche une éducation trop laxiste.

Celle-ci, a contrario, est plutôt inquiète par rapport à l’impasse sociale que pourrait subir à l’avenir Camille.

Bref, quelles que soient leurs postures respectives, tous les deux en villégiature à Concarneau se la jouent mauvaise foi réciproque en rejetant plus ou moins sur le conjoint la responsabilité d’une situation qu’il n’aurait pas vu venir ou dont ils feignent ensemble ne pas avoir perçu les signes avant-coureurs.

Après bien des atermoiements, rendez-vous téléphonique sera pris avec leur anti-héros chéri qui, lui, resté à Paris, va ainsi recevoir ses parents pour la première fois, en son domicile de jeune homme autonome.

Intervenant alors comme un véritable manifeste à l’égard de la liberté des mœurs revendiquée par les nouvelles générations, Camille (Louis Le Barazer) va se lancer dans une diatribe décomplexée et franche du collier, laissant finalement son père & sa mère plus ou moins pantois et tétanisés mais surtout pas vraiment convaincus.

Alors que la tension latente n’aura cessé de monter dans les esprits chauffés à blanc face à un déficit de compréhension partagée, une information dramatique va leur parvenir, enclenchant d’emblée une « marche arrière toute » où Francis Huster, assumant l’intolérance chronique sera en charge de faire un « mea culpa » universel remettant les pendules affectives à leur place familiale.

Tonnerre d’applaudissements récompensant à la fois les artistes sur scène et l’auteur ayant cette faculté instinctive de toucher juste là où les gens sont sensibles à l’approche d’une certaine vérité intuitive.

Plaçant d’évidence dans le feu des projecteurs la révélation de Louis Le Barazer, le jeu des trois comédiens, délibérément emphatique et quelque peu caricatural, n’est pas pour rien dans le succès de cette pièce qui a, entre autres, la vertu de susciter les conversations après spectacle car malgré un happy-end réconfortant, les problèmes du vivre ensemble dans la tolérance y sont exposés de manière effectivement contradictoires.

Theothea le 31/10/18

     

                 

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